Mahamat Déby: réaction mesurée des Occidentaux à sa victoire
17 mai 2024Selon l'Elysée, c'est à travers un appel téléphonique que le président français a "félicité", ce vendredi 17 mai, Mahamat Idriss Déby Itno pour son élection à la présidence du Tchad.
Emmanuel Macron a aussi demandé au président élu de poursuivre le "dialogue" politique.
Les Etats-Unis, de leur côté, relèvent certaines irrégularités et manques de transparence, mais saluent le déroulement pacifique du scrutin, même si Washington dit regretter les victimes des tirs de célébration qui ont suivi l'annonce des résultats provisoires, le 9 mai.
Les Américains appellent par ailleurs à plus d'inclusivité et de transparence lors des futures échéances électorales.
Outre la France ou les Etats-Unis, avant la proclamation des résultats définitifs de cette présidentielle, l'Union européenne, qui suit de près le processus, s'était inquiétée pour sa part de possibles "violences post-électorales" et avait déploré la mise à l'écart de nombreux observateurs.
Presque pas ou peu de critiques donc. Et cela peut se comprendre, selon le politologue tchadien Nicodème Manatouma Kelma.
"Sur le Sahel et surtout le Tchad, on est un peu dans la realpolitik. Aujourd'hui, le pays qui reste encore, avec beaucoup de réserve, allié de la France, c'est le Tchad. Cette communauté internationale, ces pays sont dans une position prudente, pour ne pas entrer en conflit, pour ne pas créer encore d'autres tensions qui pousseraient le Tchad vers un autre adversaire sur la scène internationale, je veux parler de la Russie. C'est cela aussi qui fait que les valeurs qui ont fondé ces pays, ou certaines institutions comme l'Union européenne, se perdent un peu" explique-t-il.
D'autres priorités
Selon Ulf Laessing, responsable du programme Sahel à la Fondation Konrad Adenauer, si les occidentaux semblent indulgents avec Mahamat Idriss Déby, c'est qu'ils croient que ce dernier est en mesure "d'assurer une certaine stabilité" au Tchad.
Alors que les relations entre certains pays occidentaux et ceux du Sahel se sont tendues ces dernières années, les occidentaux sont par ailleurs également dans une logique de se concentrer davantage sur les pays du Golfe de Guinée.
"Les occidentaux, pour le moment, sont très occupés avec les pays du Golfe comme la Côte d'Ivoire, le Togo, le Bénin... Ils sont en train d'établir une mission de formation militaire et d'augmenter l'aide au développement... parce qu'ils ont peur que la crise au Sahel, l'instabilité comme on l'a vu au Mali, au Niger, au Burkina Faso, arrive dans les pays limitrophes..." explique Ulf Laessing.
Quoi qu'il en soit, à présent qu'il est désigné officiellement à la tête du pays, Mahamat Idriss Déby aura fort à faire pour satisfaire les Tchadiens.
De nombreux défis
Outre les questions économiques, ou encore le chômage des jeunes, il devra faire face à l'insécurité liée à la menace de groupes rebelles. Nicodème Manatouma Kelma rappelle que même si l'accord de Doha avait réuni certains de ces groupes rebelles, la menace est toujours là.
"Il y a encore quelques éléments qui restent encore, il faut rapidement trouver une solution pour négocier. Trouver une solution...afin d'éviter d'autres tensions, d'autres conflits" souligne-t-il.
Tout comme Ulf Laessing, Nicodème Manatouma Kelma explique également que "la question de la frontière avec le Soudan, c'est une question importante" car il y a des milliers de réfugiés soudanais qui sont là, des réfugiés dont il faut s'occuper.
Par ailleurs "la frontière sud n'est pas encore complètement sécurisée. On a aussi le lac Tchad puisque le groupe Boko Haram est encore présent..." rappelle encore Nicodème Manatouma Kelma.
Autant de défis que devra donc relever le nouveau président Mahamat Idriss Déby et qui nécessiteront sans doute d'importants moyens.