Guerre Israël-Hamas : la position des pays arabes
13 août 2024Certains arabes entretiennent des relations étroites avec Israël en coulisses, d'autres abritent des groupes soutenus par l'Iran qui se considèrent comme faisant partie de "l'axe de la résistance" opposé aux États-Unis et à Israël. Le point sur la position d'un certains nombre d'entre eux.
Jordanie : un exercice d'équilibriste
La Jordanie, monarchie constitutionnelle, négocie un délicat exercice d'équilibre. Une personne sur cinq en Jordanie, y compris la Reine, est d'origine palestinienne. Le désir d'un État palestinien et de l'égalité des droits est cher au cœur de nombreux Jordaniens. Les dirigeants du pays s'expriment souvent sur la question.
Mais la Jordanie est également plus proche d'Israël et des États-Unis que de nombreux habitants ne le pensent, selon les experts. En 1994, la Jordanie signa un accord de paix avec Israël. Les deux pays collaborent sur des questions liées à la sécurité, telles que la sécurité dans l'enceinte de la mosquée Al-Aqsa.
En 2021, les États-Unis et la Jordanie ont conclu un accord de coopération en matière de défense qui permet aux forces, véhicules et avions américains d'entrer et de circuler librement en Jordanie.
La Jordanie entretient des relations diplomatiques avec l'Iran, mais celles-ci sont plutôt froides.
Égypte : intérêt personnel et diplomatie
L'Égypte voisine, sous le gouvernement autoritaire dirigé par Abdel Fattah El-Sissi, doit également équilibrer soigneusement ses relations avec Israël.
Depuis la signature d'un traité de paix avec Israël en 1979, " l'Égypte s'est efforcée d'équilibrer ses intérêts nationaux, notamment en ce qui concerne l'insécurité dans le Sinaï, avec le soutien à la cause palestinienne ", indique un rapport publié en mai par le groupe de réflexion International Crisis Group.
La coopération égyptienne avec Israël en matière de sécurité et d'économie est monnaie courante et, jusqu'au début du conflit à Gaza, l'Égypte était responsable du poste-frontière de Rafah. Les demandes israéliennes de pouvoir contrôler cette zone sont problématiques pour l'Égypte, tout comme le risque de voir la catastrophe humanitaire qui ne cesse de s'aggraver à Gaza se répandre sur le territoire égyptien.
Le gouvernement égyptien s'opposait auparavant au Hamas, qu'il considérait comme une organisation islamiste et une menace pour son pouvoir. Plus récemment, cette attitude s'est assouplie et l'Égypte a joué un rôle important dans les négociations de cessez-le-feu.
Les relations de l'Égypte avec l'Iran se sont améliorées depuis 2023, mais elles ont aussi tendance à être froides.
Liban : la décision du Hezbollah
Le Liban, démocratie parlementaire, est occupé à gérer ses propres urgences politiques et économiques. Il n'a pas eu de gouvernement élu depuis 2020 et fait face à l'une des pires crises économiques au monde. Auparavant, le gouvernement libanais était toujours composé de représentants des nombreux groupes religieux et ethniques du pays.
L'aile politique du Hezbollah est l'une d'entre elles et joue un rôle important dans la gouvernance du Liban. Mais à cet égard, il doit équilibrer ses propres intérêts avec ceux d'autres groupes puissants, notamment les chrétiens libanais, les musulmans sunnites et les Druzes.
La branche militaire du Hezbollah est, elle, classée comme organisation terroriste par les États-Unis et certains pays européens.
De nombreux politiciens libanais et habitants du pays ne souhaitent pas nécessairement voir le Hezbollah entamer un combat plus important avec Israël.
Mais les politiciens libanais savent également qu'ils ont peu de contrôle sur le Hezbollah, qui est l'acteur le plus puissant de ce que l'on appelle "l'axe de la résistance", une coalition souple de groupes militants soutenus par l'Iran et opposés à Israël et aux États-Unis.
Syrie : l'Iran en ligne de mire
Depuis la création de l'État d'Israël en 1948, la Syrie se considère en guerre contre son voisin. Des échanges de tirs ont souvent eu lieu entre les deux pays, bien qu'ils aient été le plus souvent considérés comme symboliques.
Aujourd'hui, le dirigeant syrien Bachar al-Assad est redevable à l'Iran, qui l'a soutenu militairement pendant les 13 années de guerre civile qu'a connues le pays. Cela explique la présence croissante de milices pro-iraniennes en Syrie, dont des membres du Hezbollah et d'autres originaires d'Irak.
Irak : opposé à toute ingérence extérieure
L'Irak ne reconnaît pas Israël et, bien que le gouvernement irakien se soit rapproché de l'Iran au cours de la dernière décennie, la question palestinienne transcende les lignes sectaires, selon les experts.
À l'intérieur de l'Irak, un certain nombre de groupes militants appartiennent également à l'axe de résistance de l'Iran. Ces groupes ont déjà tiré des roquettes sur des bases américaines en Irak et ont également tenté, en vain, de frapper Israël. Les États-Unis ont pris des mesures de rétorsion à leur encontre.
Le gouvernement irakien et ses forces de sécurité ont tendance à tolérer ces groupes ou à n'avoir que peu de contacts avec eux.
" L'Irak a toujours dû équilibrer ses relations entre les États-Unis et l'Iran", a récemment déclaré Marsin al-Shamary, chercheur à la Brookings Institution, un groupe de réflexion basé à Washington.
L'Irak a toujours soutenu la cause palestinienne.
Yémen : tout sur les Houthis
En raison d'une guerre civile, le Yémen est divisé entre le gouvernement internationalement reconnu basé à Aden, dans le sud du pays, et le groupe rebelle des Houthis, dans le nord du Yémen. Aucun des deux ne reconnaît Israël.
Les Houthis font aussi partie de l'axe de la résistance. ils soutiennent le Hamas, affirment qu'Israël est une force d'instabilité au Moyen-Orient et s'opposent à la présence des États-Unis dans la région. En novembre de l'année dernière, ils ont commencé à tirer des roquettes sur Israël et à bloquer le trafic maritime pour soutenir le Hamas.
L'Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et le Qatar : pragmatiques et riches
Les monarchies autocratiques des États arabes du Golfe ont adopté une approche plus pragmatique du conflit actuel. Elles considèrent l'Iran comme un ennemi et s'efforçaient auparavant de normaliser les relations avec Israël.
En 2020, les Émirats arabes unis et Bahreïn ont tous deux signé les "accords d'Abraham", qui établissent des contacts diplomatiques avec Israël. L'Arabie Saoudite semblait être le prochain pays.
Cependant, les attaques du Hamas du 7 octobre dernier ont compliqué ce processus, et les attaques des Houthis ont également augmenté les risques de conflit pour l'Arabie saoudite au Yémen.
Le Qatar a plutôt joué le rôle d'intermédiaire. Il évite toute normalisation avec Israël, mais a établi des liens économiques avec le pays dans les années 1990. Parce qu'il héberge également la branche politique du Hamas, le Qatar a joué un rôle important dans les négociations de cessez-le-feu.