Critiqué, le président égyptien en passe d'être réélu
11 décembre 2023Les Egyptiens ont commencé à voter depuis le dimanche 10 décembre, pour une élection présidentielle largement éclipsée par la guerre entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza voisine. Sans surprise, le président sortant, le maréchal Abdel Fattah Al-Sissi, semble assuré d'être réélu pour la troisième fois consécutive.
Trois candidats lui font face. Il s'agit de Farid Zahran, le président du Parti égyptien démocratique et social (classé à gauche), Abdel-Sanad Yamama, du Wafd, parti fondé au début du XXe siècle, mais devenu marginal et Hazem Omar, du Parti populaire républicain
Bilan controversé
Dans ce pays de 106 millions d'habitants confronté à la plus grave crise économique de son histoire, les questions liées au pouvoir d'achat seront la priorité, deux tiers de la population vivant en-dessous ou juste au-dessus du seuil de pauvreté.
Campagne de répression contre les opposants, restriction des libertés fondamentales, inflation galopante, chômage et migration des jeunes vers l'Europe : le bilan du président égyptien, Abdel Fattah Al-Sissi, est plutôt sombre et controversé.
D’après les chiffres de l’Institut national des statistiques, le pays reste frappé par une crise économique sévère avec un accès limité des populations à leurs droits économiques et sociaux. Pour l’année 2023-2024, par exemple, le gouvernement a alloué la moitié de son budget au remboursement de la dette. L’accord avec le Fonds monétaire international n’a pas permis la sortie de crise.
Aujourd’hui, le salaire moyen a connu une légère augmentation, mais l’inflation tourne toujours autour de 40%. Les prix des denrées alimentaires ont augmenté de près de 70% entre août 2022 et juillet 2023.
Libertés en danger
S’agissant du respect des libertés fondamentales, le bilan est encore plus préoccupant qu’il y a neuf ans, a déploré Souleimene Benghazi, chargé de campagne Egypte à Amnesty International.
À l'en croire, "les autorités égyptiennes ont intensifié la répression de toutes formes de dissidence en amont de ces élections". Il ajoute que "depuis le 1er octobre, nous avons documenté au moins 196 personnes qui ont été arrêtées et interrogées parce qu’elles sont soupçonnées d’avoir participé à des manifestations non autorisées, des activités liées au terrorisme et pour avoir diffusé de fausses informations."
Flux migratoire
Outre la restriction des libertés fondamentales et la crise économique, le flux des migrants vers l’Europe ne s’améliore pas, malgré les nombreuses aides extérieures.
Abdoulaye Ngom est enseignant-chercheur à l’université Assane Seck de Ziguinchor au Sénégal, et spécialiste des migrations internationales.Il explique que "ces aides avaient permis à certains jeunes de pouvoir s’occuper, d’avoir une activité, mais très souvent, on a observé qu’au bout de quelques mois ou de quelques années, les jeunes réutilisent l’argent qu’ils ont gagné à partir de ces activités pour encore émigrer. Donc il y a eu des avancées, mais cela n’empêche pas les jeunes de partir jusqu’à présent."
Il y a quelques mois, l’Union européenne a promis d'octroyer à l'Egypte un fonds pour lutter contre le chômage et améliorer sa situation économique, afin de limiter la migration depuis le Moyen-Orient. Mais on ignore encore le montant et les différents canaux de financement de ce fonds.