Une bataille remportée contre Facebook
6 octobre 2015Europe contre Facebook: c’est le nom de l’initiative fondée par un jeune étudiant autrichien de 27 ans, Maximilian Schrems. Il milite depuis plusieurs années pour une meilleure protection des données des internautes européens. Et en 2013, il a porté plainte contre le réseau social américain Facebook devant les autorités irlandaises. En Irlande, car c'est là que Facebook possède son siège social européen, comme nombre d’autres géants du Web.
En cause : le transfert de ses données vers les États-Unis, où selon Maximilian, la protection n’est pas suffisante. Sa plainte a fini devant la Cour de Justice de l’Union Européenne, et la décision que celle-ci a rendu aujourd’hui est historique. Car si c’est à Facebook que Max s’en est pris en premier, c’est en fait quelque 4400 entreprises américaines qui sont concernées. Toutes transfèrent des données personnelles d’internautes européens vers les États-Unis.
Un traité, passé en 2000 entre l’union Européenne et les États-Unis, réglementait ces échanges. C’est ce traité que la Cour de Luxembourg a invalidé aujourd’hui, considérant que les États-Unis ne garantissent pas aux internautes européens une protection suffisante. Son argument phare: les autorités nationales de contrôle doivent pouvoir veiller à la protection de la vie privée de leurs ressortissants. Or les autorités publiques américaines, selon le traité dit de "Safe Harbor" ou "sphère de sécurité", avait le droit d’accéder à toute donnée en invoquant la sécurité nationale ou l’intérêt public.
Une exception très générale, qui faisait grincer bien des dents depuis les révélations de Edward Snowden en 2013, sur les programmes américains de surveillance de masse. Celles du Parlement Européen par exemple, dont une commission d’enquête avait déjà plaidé en janvier dernier pour l’invalidation de ce traité. C’est chose faite.
Dans l’immédiat, la balle est dans le camp des autorités irlandaises, à qui il revient désormais d’examiner si il convient de suspendre le transfert des données des abonnés européens de Facebook. Difficile de croire que le flux de données de Facebook et consorts va être interrompu du jour au lendemain. Les enjeux économiques sont trop importants. Mais dans le débat, les standards européens de protection, plus restrictifs, viennent de reprendre le premier plan.