Tchad : le dialogue national est reporté
28 janvier 2022La décision du report a été prise à l’issue d’une réunion tenue le jeudi 27 février au palais présidentiel de N’Djaména, entre le président du Conseil militaire, le Premier ministre, les membres du Comité d’organisation du dialogue national inclusif et ceux du Comité technique spécial en charge de la participation des politico-militaires.
La raison officielle de ce report est, selon le gouvernement, de permettre d'abord l’organisation du pré-dialogue avec les politico-militaires, des représentants des groupes armés, qui s’ouvrira le 27 février à Doha au Qatar.
"Constatant la dispersion dans le monde (des chefs rebelles) les questions logistiques - beaucoup n'ont pas de document de voyage" -, (...) le Qatar a proposé de les réunir à Doha à partir du 27 février", a expliqué le Premier ministre, Albert Pahimi Padacké, au sortir de cette réunion.
Selon lui, ce pré-dialogue qui devrait durer deux semaines est considéré comme un préalable à la tenue du dialogue national.
Arguments peu convaincants
Les arguments avancés par les autorités de la transition pour justifier le report du dialogue national ne convainquent pas Max Kemkoye, le président du parti Union des démocrates pour le développement et le progrès.
"Je ne suis pas du tout convaincu et je ne serai jamais convaincu par les arguments avancés. Parce que pour moi c’est l’illustration du premier mensonge qui a été servi aux Tchadiens le 31 décembre dernier. Tous les ressorts de la transition sont cassés. Les gens veulent nous endormir pour nous mener vers une prorogation de cette transition", soutient-il.
Ouverture
Entre temps, la junte militaire est en contact avec des activistes de la diaspora, des exilés politiques, les membres et cadres des principaux mouvements politico-militaires pour les convaincre de rentrer au Tchad.
Parmi eux : l’Union des forces pour la résistance, dirigée par Timane Erdimi, neveu du président défunt, Idriss Déby Itno, le Mouvement pour la paix, la reconstruction et le développement du colonel Djibrine Dassert et l’Union des forces pour la démocratie et le développement de l’ancien ministre de la défense, le général Mahamat Nouri.
Le retour de ces exilés a été possible grâce à la "volonté politique" du président du Conseil militaire de transition, explique le président du groupe de réflexion Tchad notre patrimoine, Kebir Mahamat Abdoulaye.
Pour le Togolais Kag Senoussi qui dirige l’Initiative panafricaine pour le dialogue, la paix et le développement au Tchad, c'est le contexte même qui est favorable à cette décrispation.
Il estime que "la plupart des rebelles et des activistes se retrouvent dans une situation aujourd’hui où ils se disent que la transition n’est-elle pas une opportunité pour saisir cette main tendue ? Se dire qu’on peut essayer d’aller à la paix ? Il y a eu des éléments qui ont pu créer cette confiance totale pour se dire que le nouveau dirigeant du pays a besoin d’eux donc il y a une occasion de construire la paix."
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Un avis que partage également le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement tchadien, Abderaman Koulamallah.
"Cela prouve que la politique que nous menons est une politique rassembleuse, on n’exclut personne. Quels que soient les évènements douloureux qui se sont passés, nous avons décidé de montrer notre disponibilité, notre sympathie à qui veut l’entendre. Tous les opposants sont toujours les bienvenus", rassure Abderaman Koulamallah.
Malgré les recommandations du Conseil de paix et de sécurité de l'Union africaine, ou encore de l’Union européenne, pour une transition de 18 mois devant déboucher sur des élections, la junte militaire au pouvoir est loin de tenir ce calendrier.