Réactions après la candidature d’Alassane Ouattara
7 août 2020Après plusieurs semaines de suspense, Alassane Ouattara, le président sortant, vient d’annoncer officiellement sa candidature. Cette candidature intervient à la suite du décès d’Amadou Gon Coulibaly, premier ministre et candidat désigné par la coalition au pouvoir pour succéder à Alassane Ouattara.
"J’ai décidé de répondre favorablement à l’appel de mes concitoyens, me demandant d’être candidat à l’élection présidentielle du 31 octobre 2020. Je suis donc candidat à l’élection présidentielle du 31 octobre 2020.", a déclaré jeudi (06.08.20) le chef de l’Etat ivoirien, dans un discours à la télévision nationale.
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Violation de la constitution
Le chef de l’Etat a profité de son allocution à la veille de l’indépendance de la Côte d’Ivoire pour annoncer son intention de se lancer dans la course au scrutin présidentiel. Le pays célèbre vendredi (07.08.20) le 60e anniversaire de son indépendance.
"C’est un candidat qui parle, c’est le président de la République, mais c’est un candidat qui parle et qui s’adresse á l’ensemble du peuple. C’est une heure de grande écoute. Il profite de cette heure-là pour faire cette annonce.", constate Ousmane Zina, enseignant-chercheur á l’université de Bouaké.
Pour Pulchérie Gbalet, leader de la société civile et proche de l’ancien président Laurent Gbagbo, cette déclaration de candidature est une violation de trop de la constitution ivoirienne :
"Ce n’est pas une surprise pour nous, qu’il le confirme maintenant. Même s’il ne l’avait pas dit, nous le savions déjà. Nous ne l’acceptons pas et nous allons le manifester."
De leur côté, les militants du RHDP, le parti au pouvoir, estiment que la Côte d’Ivoire s’est dotée d’une nouvelle Constitution. Les compteurs sont donc remis à zéro, en termes de mandat présidentiel.
Réaction mitigée au sein du RHDP
Depuis quelques semaines, les déclarations et les mouvements de soutien des dignitaires du parti au pouvoir pour exiger la candidature du président Ouattara se sont donc multipliés. Pourtant, Alassane Ouattara a maintes fois déclaré qu’il ne serait pas candidat.
Yeo Pépéléagui, membre de la jeunesse du RHDP, le parti présidentiel, semble déçu par la décision de son mentor :
"Le constat, il est clair. C’est que nous sommes dans une logique d’un match retour de 2010. Dont les acteurs sont encore les mêmes qui iront à cette élection du 31 octobre 2020 prochain."
Jeudi (06.08.20), des milliers de militants se sont réunis dans des communes d’Abidjan et à l’intérieur du pays, notamment à Bouaké et á Korhogo, pour saluer cette annonce de la candidature d’Alassane Ouattara.
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Echec de la classe politique
Le RHDP a été qualifié de grand parti avec de nombreuses compétences. Mais avec ce revirement d’Alassane Ouattara,
Marie-Noëlle du PDCI-RDA estime que la coalition qui a porté Alassane Ouattara au pouvoir s’est vidée de ses vrais hauts cadres et ressemble aujourd’hui à un tigre en papier. Elle s’interroge sur le moment choisi pour annoncer la candidature :
"Comment comprendre que c’est pendant le discours pour l’indépendance qu’il annonce sa candidature en tant que candidat pour un parti politique ? Cela démontre le mépris contre l’emblème et les armoiries de l’Etat. Alassane vient de fouler au pied les fondements de notre nation."
Tous ici avaient espéré voir Alassane Ouattara passer le flambeau à une nouvelle génération. Geoffroy Kouao, analyste politique et juriste, soutient que les principaux leaders politiques n’ont simplement pas confiance en leur jeunesse. Pour lui, c’est un véritable échec :
"Cette candidature de monsieur Ouattara montre l’échec de la politique ivoirienne. C’est-à-dire que depuis près de trente ans, la classe politique a été incapable de préparer des jeunes pouvant assumer le destin du pays."
L’annonce de la candidature d’Alassane Ouattara intervient après celle d’Henri Konan Bédié, 86 ans.
Aujourd’hui, tous les regards sont tournés vers les principaux partis de l’opposition. Cette même opposition avait tenté une manifestation jeudi (07.08.20) devant la commission électorale indépendante. Mais très vite, cette manifestation a été réprimée par la police.
A l’approche du 31 octobre, date du premier tour du scrutin présidentiel, la tension monte entre pouvoir et opposition. Les populations, de leur côté, retiennent leur souffle.