"Nous n'avons rien reçu du Rwanda, pas même une aiguille"
13 juin 2022Rébellion vaincue en 2013 par Kinshasa, le M23 ("Mouvement du 23 Mars") a repris les armes fin 2021, en accusant les autorités congolaises de ne pas avoir respecté les accords de paix signé au Kenya entre les deux parties belligérantes, après la défaite militaire de la rébellion.
Le porte-parole du M23, Willy Ngoma, répond à différentes accusations et revient sur les revendications du mouvement. Il a été joint ce lundi 13 juin par la DW.
DW : Pourquoi avez-vous pris les armes ?
Willy Ngoma : Le Congo a un problème très sérieux. Les politiciens ont pris le pays en otage. Ils considèrent le pays comme leur butin de guerre. Le peuple souffre, les gens mangent à tour de rôle dans certaines familles. Les prisons sont des mouroirs, il n'y a pas de routes, dans l’enseignement rien ne va, dans les hôpitaux, il n’y a pas de médicaments.
DW : Est-ce que cela suffit pour prendre les armes, ces revendications ? On ne peut pas régler tout cela politiquement ?
Willy Ngoma : C’est ce que nous avons fait à l’époque. Nous avons signé des accords depuis 2013. Depuis cette date, ils n’ont pas fait quelque chose. Nous avons attendu jusqu’à 2017. Nous étions en exil en Ouganda. Nous sommes revenus dans les collines. Pendant cinq ans, nous sommes restés là-bas, sans déranger personne. Nous avons dit au gouvernement que pendant dix ans, nous avons abandonné nos familles, que nous sommes en exil, sans conditions, acceptez que nous puissions rentrer dans notre pays, aidez-nous à rentrer dans notre pays. Ils ont refusé. En retour, ils viennent nous attaquer. Nous avons riposté, rien que pour nous défendre. Ils cherchent à nous exterminer. Ils ont dit que nous ne sommes pas des Congolais, que nous sommes des Rwandais.
DW : Donc vous avez des revendications identitaires ?
Willy Ngoma : Ce n’est pas tellement des revendications identitaires comme vous pouvez le croire. Il y a dans les revendications aussi des revendications d’ordre identitaire.
DW : Quelles sont vos principales revendications, que voulez-vous concrètement ?
Willy Ngoma : Ce que nous avons signé avec le gouvernement congolais, avec le président Tshisekedi. Que nous puissions prendre tous les politiciens du M23 et les militaires et les remettrent à la disposition du président Tshisekedi. Les militaires iront au Congo central pour leur cantonnement. On doit créer une brigade de quatre bataillons avec l'armée congolaise pour traquer notamment les ADF.
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DW : Le gouvernement congolais et des défenseurs des droits de l’homme, accusent le Rwanda de vous soutenir militairement, que répondez-vous à cela ?
Willy Ngoma : Nous avons fait cinq ans dans les collines. Dieu nous est témoin. Comment nous nous sommes battus pour vivre. On a eu aucun soutien sauf de nous-mêmes.
DW : Mais d’où tirez-vous toutes ces armes dont vous disposez ?
Willy Ngoma : Nous avons trois sources d’armes. La première source, ce sont nos caches d’armes. Nous avions caché des armes dans les zones que nous contrôlions en 2013. Le gouvernement a pu détecter certaines de ces caches. Nous avons déterré ces armes. Nous avons commencé l’action
Notre deuxième source, nous achetons des armes au sein des FARDC. Ils en sont conscients. Ils vendent des armes et des munitions. Des civils achètent des armes à bas prix chez eux et nous les revendent à des prix exorbitants.
Notre troisième source, lorsqu’il y a des affrontements avec les FARDC, ils jettent leurs armes que nous récupérons.
DW : Vous achetez des armes avec quel argent ?
Willy Ngoma : Nous avons travaillé au sein de ce gouvernement et nous avons fait des économies. Nous donnons notre sang pour cette cause noble. Nous vendons nos vaches, nos maisons, nos voitures. Nous avons tout vendu pour cette cause.
DW : Vous ne recevez aucun soutien du Rwanda ?
Willy Ngoma : Même pas une seule aiguille. Pas même d’un autre gouvernement. C’est par notre détermination que nous faisons fonctionner notre mouvement. Là où nous sommes, il n’y a pas de minerais que nous contrôlons. Nous avons tout sacrifié pour cette cause. Il y a seulement de la pomme de terre et des oignons. Pas de minerais.
DW : Et ces deux soldats rwandais qui auraient été arrêtés à vos côtés ?
Willy Ngoma : L'endroit où les combats se déroulaient est différent de là ou ces militaires ont été arrêtés. Ces militaires ont été kidnappés.
DW : A quelles conditions êtes-vous prêts à mettre fin aux combats avec l’armée congolaise ?
Willy Ngoma : Nous sommes ouverts au dialogue, un dialogue franc. Nous sommes tous des Congolais, des Africains. Il y a ce que l’on appelle l’arbre à palabre. Le linge sale se lave en famille. Qu’on se parle entre frères et nous allons trouver un modus vivendi entre nous.
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