En RCA, les victimes de crimes de guerre abandonnées
12 février 2024En République centrafricaine, après la condamnation de leurs bourreaux par la Cour pénale spéciale, la CPS, les victimes de crimes de guerre de Koundjili et Lemouna attendent toujours réparation. Les veuves se disent abandonnées. Et n'arrivent pas à subvenir aux besoins de leurs enfants. Face à cette situation, la CPS fait de la pédagogie autour de sa décision pour mieux l'expliquer aux populations. Mais cette approche est loin de rassurer les victimes.
Condamnations par la CPS
Trois personnes ont été reconnues coupables de crimes de guerre commis à Koundjili et Lemouna et ont été condamnées respectivement à 30 ans et 20 ans de prison.
Ils doivent alors payer la réparation aux victimes. Sauf qu'ils ont été déclarés indigents. Pour cela, une délégation de la CPS s'est rendue à Paoua à la rencontre des victimes pour leur expliquer comment se fera la réparation. Gervais Bodagaye, chef de la cellule communication de la Cour.
"Il s'agit d'un apport essentiel de la cour aux communautés, aux familles de Koundjili et de Lemouna afin de rehausser leur niveau de vie et de soutenir cette communauté. Donc il s'agit d'un soutien holistique".
Le désespoir des victimes qui attendent...
Hélène Ndjoundiarami a perdu son mari à Koundjili. Mère de 10 enfants, elle est désespérée :
"Ce qui s'est passé à Koundjili et Lemouna est insupportable et intenable pour nous. Les ONG sont venues nous promettre qu'elles vont nous soutenir, nous les veuves et les orphelins. Ce qui nous a rassuré un peu. Mais depuis, nous n'avons rien vu venir. S'il n'y a rien, qu'on nous laisse dans notre souffrance au lien de nous déranger avec des histoires de veuves et d'orphelins", raconte Hélène Ndjoundiarami.
... et la déception
Simplice Dissi est le président des victimes de Koundjili et Lemouna. Les rebelles ont tué ce 21 mai 2019, 11 membres de sa famille, dont son grand frère député suppléant, et violé ses sœurs.
Il a la lourde responsabilité de prendre en charge les orphelins. S'il se réjouit de la condamnation des bourreaux, il est néanmoins déçu de la réparation annoncée.
"Le procès a été bien mené, mais seulement, c'est la phase de réparation qui ne marche pas. Ce qui nous déçoit davantage. Ensuite, les victimes que sont les veuves et les orphelins, il n'y a personne pour leur venir en aide. Certes, certains orphelins continuent de fréquenter, mais il n'y a pas assez de moyens et personne pour leur venir en aide, à l'exception de l'église Emmaüs de Paoua Elien. Elle prête main forte à quelques orphelins et les autres sont laissés pour compte".
La CPS a décidé aussi, en guise de réparation, la construction d'un monument en hommage aux personnes tuées. Ce qui est rejeté par les communautés, car contraire à la tradition locale.