Côte d'Ivoire: la santé des candidats fait débat
6 juillet 2020Le 20 juin dernier, celui qu’on surnomme le "sphinx de Daoukro", l’ancien président Henri Konan Bédié renversé lors d’un putsch militaire en 1999, a annoncé qu’il serait candidat à l’investiture de son parti pour l’élection présidentielle du 31 octobre 2020. Une candidature acceptée par la convention du Parti démocratique de Côte d'Ivoire, le 2 juillet, au détriment de Kouadio Konan Bertin, dit "KKB", l'un des jeunes du parti.
"Il avait dit lui-même en 2010 (Henri Konan Bédié) qu’il était à son dernier combat. Il ne peut pas avoir livré son dernier combat en 2010 et en livrer un autre aujourd’hui. Excusez-moi de vous le dire, le PDCI ne fait plus peur sur l’échiquier politique ivoirien. Non. Il faut redonner une âme au PDCI-RDA. Après, lui-même reconnaît que l’exercice du pouvoir demande un peu de force qu’il n’a plus. Après la Covid, il faut bâtir le nouveau monde ou le monde nouveau. Ce n’est pas avec les matériaux de l’ancien monde qu’on va bâtir le monde nouveau", affirme à la DW Kouadio Konan Bertin.
"Déjà en 2010, Bédié n'a pas pu faire campagne"
Une analyse que partage Sylvain N'Guessan, docteur en théories politiques et analyste de la vie politique ivoirienne. Il dirige à Abidjan l’Institut de Stratégies.
À l'en croire, "déjà en 2010, il y a dix ans de cela, il avait 76 ans, donc le président Bédié n’a pas pu faire campagne, il n’a pas pu sillonner les régions. Même les débats télévisés, le président Bédié n’a pas pu y participer. Donc, on imagine dix ans plus tard, quel est son état physique pour pouvoir sillonner les 31 régions, les 10 districts de la Cote d’Ivoire, les quelques 105 départements. On verra bien", dit Sylvain N'Guessan. Il rajoute: "Mais, à mon avis, même s’il était élu, à 86 ans, je serais surpris de voir un président travailler de 6 heures à 20 heures. Et donc, ce serait son Premier ministre et vice-président qui seront au-devant des décisions stratégiques, des dossiers chauds de la République".
Amadou Gon Coulibaly reste candidat du RHDP
Pour sa part, le Rassemblement des Houphouëtistes pour la démocratie et la paix, le RHDP, parti au pouvoir, a porté son choix sur le Premier ministre Amadou Gon Coulibaly. Un Premier ministre qui est rentré à Abidjan le 2 juillet dernier après deux mois d’un traitement médical à Paris. En dépit de son état de santé chancelante, son parti lui renouvelle son soutien.
"À partir du moment où nous l’avons désigné, à moins d’un cataclysme, c’est notre candidat. Pour nous, il est arrivé, il est très en forme (Amadou Gon Coulibaly) Et donc, nous sommes prêts à l’accompagner pour aller récupérer le fauteuil le 31 octobre. Et qui vous dit même que peut-être nos frères du PDCI (Parti démocratique de Côte d’Ivoire dirigé par l’ancien président Henri Konan Bédié) ne viendront pas nous rejoindre à quelques deux semaines de l’élection. On ne sait jamais", soutient Joël N'guessan, ancien ministre et membre du Conseil politique du RHDP.
L’on ne connaît toujours pas le nom de celui qui défendra les couleurs du FPI, le Front populaire ivoirien, de l’ancien président Laurent Gbagbo, miné par des dissensions internes.
Quant à l’ancien chef rebelle, Guillaume Soro, condamné en avril dernier à vingt ans de prison pour détournement de fonds, il est d’ores et déjà exclu de la course à la magistrature suprême.