Olaf Scholz en Chine pour un voyage axé "business"
16 avril 2024Le chancelier allemand termine sa visite de trois jours en Chine. Olaf Scholz a gardé le plus important pour la fin : il s'est entretenu aujourd'hui [16.04.24] avec le président Xi Jinping de crises internationales comme la guerre en Ukraine ou le conflit au Proche-Orient… Mais également des relations économiques entre les deux pays, qu'ils veulent intensifier, dans le secteur industriel notamment. Cette visite axée sur le "business" d'Olaf Scholz à Pékin n'est pas vue d'un bon œil dans le reste de l'Union européenne. A Bruxelles, on critique une visite non concertée avec les autres Etats membres.
Partenaire de choix pour l'Allemagne
Olaf Scholz l'a répété : la Chine reste un partenaire commercial important pour l'Allemagne et l'Europe.
En effet, la Chine pèse lourd, avec des échanges avec l'Allemagne qui s'élevaient à 250 milliards d'euros l'année dernière et avec plusieurs milliers d'entreprises allemandes implantées sur place.
D'ailleurs, comme sa prédécesseuse Angela Merkel, Olaf Scholz est accompagné dans son déplacement par une délégation de trois ministres et plus d'une dizaine de patrons de grands groupes allemands.
Mais la tendance des échanges germano-chinois est à la baisse (- 8% entre 2022 et 2023). La Chine mise désormais davantage sur les exportations que sur les importations. Elle produit maintenant dans des secteurs jadis fleurons de l'industrie allemande, comme la machine-outil ou la chimie. L'automobile, aussi.
C'est là que commence le numéro d'équilibriste du chancelier allemand.
Réduire la dépendance tout en s'assurant des débouchés
D'un côté, Olaf Scholz répète la nécessité de réduire la dépendance allemande à la Chine, que l'Allemagne doit diversifier ses chaînes d'approvisionnement. Et sur le papier, Berlin a effectivement adopté, en 2023, une stratégie globale vis-à-vis de la Chine, considérée à la fois comme partenaire commercial et "rival systémique", reprenant ainsi les termes de la Commission européenne.
Mais de l'autre, le chancelier allemand est opposé à une taxation trop drastique des voitures électriques chinoises par l'UE, de peur de voir les constructeurs allemands sanctionnés en Chine – le pays où ils réalisent un tiers de leur chiffre d'affaires.
"L'un des domaines où l'Allemagne et la Chine veulent renforcer leur coopération, ce sont d'ailleurs les véhicules sans conducteur – un secteur d'innovation technologique considéré par Berlin comme l'avenir de la mobilité.
Alors même si le chancelier Scholz assure vouloir garantir une concurrence qui garantisse les mêmes chances de départ à tous, en définissant des standards et des normes internationaux sous l'égide de l'Organisation mondiale du commerce, les autres dirigeants européens réprouvent ses relations trop lissées avec Pékin, où il se rend pour la deuxième fois depuis sa prestation de serment, fin 2021.
L'alliée de Moscou
Outre de nombreuses violations des droits humains, les Occidentaux reprochent aux autorités chinoises de livrer des biens "ambivalents" à la Russie, c'est-à-dire qui peuvent avoir un usage civil ou militaire et ainsi alimenter son économie de guerre.
Olaf Scholz a déclaré qu'il avait demandé au président Xi Jinping de convaincre Vladimir Poutine pour qu'il arrête "cette horrible guerre" et retire ses troupes d'Ukraine.
L'Allemagne et la Chine ont par ailleurs convenu de se concerter, dans les cinq prochaines années, sur l'utilisation plus durable de certains matériaux, dans le recyclage des emballages, ou le bâtiment. La ministre fédérale de l'Environnement a signé à Pékin un pacte en faveur de l'économie circulaire.
L'Allemagne s'inquiète aussi, dit le chancelier, des pratiques déloyales de la Chine qui posent des problèmes structurels à ses partenaires en Europe, sans toutefois préciser sa pensée.
Les modules solaires de fabrication chinoise en sont un exemple : moins chers que leurs pendants allemands, ils mettent les entreprises allemandes sous pression en inondant le marché européen.
La secrétaire d'Etat allemande à l'Economie s'est aussi faite l'écho de difficultés soulevées par un tiers des entreprises allemandes, selon un sondage des Chambres allemandes du commerce : les lois chinoises seraient de plus en plus floues, notamment sur le transfert des données personnelles d'un pays à l'autre.
Un ancien ministre, chrétien-démocrate et désormais dans l'opposition, se trouve lui aussi actuellement en Chine. Jens Spahn prône une Allemagne plus forte face à la Chine. Il réclame à Berlin de ne plus soutenir d'investissements européens dans le pays tant que la Chine ne respectera pas les règles de réciprocité commerciale.