Les Nouvelles routes de la soie, ou la voie royale de Pékin
25 avril 2019Près d'une quarantaine de chefs d'Etat et de gouvernement ont été invités à Pékin, en tête desquels Vladimir Poutine. L'Allemagne est représentée par son ministre de l'Economie, Peter Altmaier.
Ce projet, qui s'appelle désormais "Initiative ceinture et route", est désormais au cœur de la politique étrangère chinoise. La Chine veut étendre son influence en tissant des liens commerciaux entre l'Asie, l'Afrique et l'Europe, en échange de quoi Pékin promet aux Etats partenaires des investissements renforcés.
Infrastructures en masse
"Une coopération pour des intérêts communs" : voilà un des slogans inscrits sur les drapeaux qui bordent les grands axes de Pékin durant le sommet sur les "Nouvelles routes de la soie". Un étendard brandit haut par le chef de la diplomatie chinoise, Wang Yi, qui se félicite du fait que "ces six dernières années, certains pays se sont dotés de leur première voie rapide. D'autres ont pu grâce à l'initiative des "Nouvelles routes de la soie" construire un port et ainsi avoir accès à l'océan. Ou commencer à construire des infrastructures industrielles."
La Chine finance des infrastructures, promet des investissements, un développement économique.
"Gagnant-gagnant" pas très équitable
Mais jusqu'à présent, sous couvert de "gagnant-gagnant ", ce sont surtout les entreprises chinoises qui profitent de la coopération : elles réalisent 90% des projets lancés dans le cadre de cette coopération. Les Européens voient d'un œil critique les crédits accordés massivement par la Chine à des Etats faibles qui tombent ainsi dans le piège de l'endettement.
Jörg Wuttke, ancien président de la chambre de commerce UE-Chine, cite l'exemple d'une autoroute, construite au Monténégro par des entreprises chinoises et financée par des emprunts contractés... auprès de la Chine : "Chaque kilomètre a coûté 20 millions de dollars", explique-t-il. "Pour le Monténégro, ça représente 40% de son PIB. Et après toutes les études de faisabilité, il a été clair que le Monténégro ne pourrait jamais rembourser. Le pays se retrouve alors endetté et on peut se demander : que vont faire les Chinois avec ce débiteur qu'est le Monténégro ?"
L'Allemagne entre deux chaises
L'Allemagne, la France et la Grande-Bretagne n'ont toujours pas signé la déclaration sur l'"Initiative ceinture et route". Le projet manque pour elles de transparence, de règles du jeu équitables.
Le ministre allemand de l'Economie, Peter Altmaier (CDU), appelle au respect de standards internationaux sociaux, environnementaux et dans l'attribution des marchés.
Comme les entrepreneurs allemands (réunis au sein du BDI), le ministre est tiraillé entre le volume desdits marchés, non négligeables, et la peur de la concurrence déloyale.
En Europe, la Chine a déjà fait main basse sur plusieurs fleurons de l'économie. En Allemagne, elle lorgne sur des entreprises de machines-outils ou encore sur le port de la ville de Duisburg.
En plus de son nouveau mécanisme de contrôle des investissements étrangers, le gouvernement allemand se dit prêt à subventionner certains emplois et à investir dans le secteur de l'innovation pour contrer l'offensive commerciale de la Chine.
Mais l'Union européenne n'a pas de position unitaire vis-à-vis de la stratégie chinoise.
L'Italie se rallie
L'Italie a été le premier pays du G7 à rejoindre le projet de Pékin, pour l'extension du port de Gênes, ce qui lui a valu d'être critiquée par les autres puissances européennes.
La directrice générale du Fonds monétaire international, Christine Lagarde, est également présente à Pékin. Elle appelle de ses vœux "une régulation financière saine, des règles transparentes pour l'investissement et l'attention à la pérennité budgétaire". Par ailleurs, la patronne du FMI a salué, "le travail qui démarre maintenant pour faire en sorte que les projets des Nouvelles routes de la soie soient verts, faibles en carbone et durables pour le climat".