Guinée : une opinion publique divisée suite au verdict
1 août 2024À Conakry, comme dans la diaspora, l'opinion publique guinéenne est partagée quant au verdict du procès du massacre du 28 septembre. S'il y a bien une partie qui dit tirer satisfaction du jugement, une autre reste sur sa faim.
Cette dernière estime que les condamnations n'ont pas été assez sévères. Et pour cause, parmi les commanditaires ayant participé directement ou indirectement à l'opération au cours de laquelle plus de 150 personnes ont été sauvagement massacrées au stade de Conakry, seul Claude Pivi, en cavale, a été condamné à la prison à perpétuité.
L'ex-chef de la junte Moussa Dadis Camara ainsi que son aide de camp Aboubakar Toumba Diakité ont respectivement écopé de 20 ans et 10 ans.
Mais pour le juriste Mamoudou Diakité, dans l'ensemble, beaucoup de personnes sont satisfaites du verdict.
"L'opinion publique, par définition, n'est pas spécialiste des questions juridiques. Il y a une dose de passion dans ce qu'elle attend. Souvent, ce sont des gens qui ont des positions tranchées et qui s'attendent à ce que cette position soit confirmée, et si ce n'est pas le cas, ils estimeront que cela n'a pas été bien fait", a-t-il déclaré.
Une incapacité à présenter des preuves irréfutables
L'un des points qui a fait l'unanimité lors de ce procès, reste la requalification des faits en crimes contre l'humanité, estime le juriste Mamoudou Diakité.
Sauf que là aussi, de nombreux témoins regrettent l'incapacité du tribunal criminel à présenter des preuves irréfutables comme les couteaux, les haches et autres fusils de guerre utilisés pour massacrer les civils réunis au stade du 28 septembre.
Pire, les auteurs présumés formellement identifiés par les victimes seraient toujours introuvables.
Un travail inachevé
Certains Guinéens estiment donc que les autorités de transition pourraient bien tirer profit de l'organisation du procès auprès des partenaires internationaux, explique Ballaya Diallo de la Société civile. Celle-ci réclame la fin de la transition.
"On ne va pas leur retirer ce plaisir. Ils peuvent toujours se gargariser et dire qu'ils ont organisé le procès. Mais on sait pertinemment que le jour où le peuple en aura marre, le régime ne survivra pas plus de cinq heures de temps", assure-t-il.
Et même si les Guinéens estiment que le procès du 28 septembre est une leçon pour les dirigeants actuels et futurs du pays, il n'en demeure pas moins que les condamnations laissent entrevoir un travail inachevé et une sentence taillée sur mesure.
Pour Alassane Souaré d'Avocats sans frontières, par exemple, les accusés reconnus pour crimes contre l'humanité devraient écoper de plus de 20 ans de prison.