Vers un troisième mandat inévitable en Centrafrique ?
28 octobre 2022Au mois de mai dernier, plusieurs parlementaires de la majorité ont lancé le débat sur la révision de la Constitution centrafricaine. Une initiative qui laissait supposer qu’elle était téléguidée par le président Faustin Archange Touadera , afin de pouvoir briguer un troisième mandat.
Une initiative contestée
La société civile et l'opposition se sont mobilisés pour empêcher une tentative laquelle "voulait passer outre les lois du pays". En effet, la Constitution limite à deux les mandats présidentiels mais il est probable que le nouveau texte, non encore validé, devrait éluder l'article "gênant".
En toute illégalité d'ailleurs puisqu’une réforme de la loi fondamentale ne peut justement pas modifier cet article. Ce que la Cour constitutionnelle a récemment rappelé, s’opposant donc ouvertement au président.
Le fait que Danièle Darlan, désormais ancienne présidente de la Cour constitutionnelle, a contrecarré la proposition de révision a, selon les Centrafricains, déclenché la colère du pouvoir.
Pour Thierry Vircoulon, spécialiste de l'Afrique centrale, le décret présidentiel mettant Danièle Darlan à la retraite visait en effet à faire sauter un obstacle sur la route vers un troisième mandat.
Il précise : "Cela ouvre en effet probablement la voie. Cela montre qu'un obstacle qui se trouvait sur le chemin du gouvernement, en ce qui concerne la révision constitutionnelle, peut être levé. On verra qui remplacera madame Darlan, mais il est très probable que son remplaçant sera plus conciliant avec la procédure de révision constitutionnelle."
Bangui rejette les accusations
Mais Ghislain Djorie, porte-parole du gouvernement centrafricain, a rappelé que jamais le président Faustin-Archange Touadéra n'avait déclaré publiquement son intention de briguer un troisième mandat.
Il affirme ainsi que la mise à la retraite de la présidente de la Cour constitutionnelle n'aurait rien à voir avec le projet de révision de la Constitution . Il reprend aussi l’argument, très controversé, selon lequel c’est le peuple, plus légitime que la Cour, qui souhaiterait cette réforme.
"La Constitution est l'émanation du peuple et pas l'émanation de la Cour constitutionnelle. C'est le texte qui régit le fonctionnement de la République. Donc, de ce fait, cela devient la préoccupation de la population, pas celle de la Cour constitutionnelle qui n'est qu'une institution."
Jean-Pierre Waboe, vice-président de la Cour constitutionnelle, a donc provisoirement remplacé Danièle Darlan à la tête de cet organe.