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Donald Trump s'en prend (encore) à la justice internationale

12 juin 2020

La CPI est à nouveau dans le viseur du président américain qui lui reproche une enquête concernant notamment les soldats américains en Afghanistan.

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Les Etats-Unis ne sont pas membres de la CPI, mais les faits auraient eu lieu en Afghanistan, membre elle du Statut de Rome, ce qui rend l'enquête possible
Les Etats-Unis ne sont pas membres de la CPI, mais les faits auraient eu lieu en Afghanistan, membre elle du Statut de Rome, ce qui rend l'enquête possibleImage : picture-alliance/dpa

Donald Trump veut sanctionner économiquement les membres de la Cour pénale internationale (CPI) pour les dissuader de poursuivre une enquête. Elle vise notamment des soldats américains pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité présumés en Afghanistan. Le dossier n'est pas nouveau, mais il prend une nouvelle dimension. 

"Un langage de despote"

Depuis des mois Donald Trump s'en prend à la CPI. En mars déjà, quand l'enquête avait été ouverte, les Etats-Unis avaient annoncé des restrictions de visa pour toute personne "directement responsable" d’une éventuelle enquête, décrite comme "politique" et comme "injuste". Elle vise pourtant toutes les parties en conflit en Afghanistan : les talibans, les forces afghanes et les armées étrangères, dont l’armée américaine et ses services de renseignement.

Mais désormais la Maison Blanche menace personnel et magistrats de la CPI de saisies de biens, de comptes financiers ou encore d'interdiction de voyage.

Une ligne rouge inadmissible pour tous ceux qui veulent de la justice, s'agace Bruno Stagno, chef-adjoint de plaidoyer de Human Right Watch. "C'est un langage et des mesures propres aux despotes, aux grands violateurs des droits de l'homme", insiste-t-il. "C'est une inversion de rationalité de la justice qui est sans égale". 

"Nous ne pouvons pas rester les bras croisés pendant que nos gars sont menacés par un tribunal bidon", a dit le chef de la diplomatie américaine Mike Pompeo
"Nous ne pouvons pas rester les bras croisés pendant que nos gars sont menacés par un tribunal bidon", a dit le chef de la diplomatie américaine Mike PompeoImage : picture-alliance/AP Photo/A. Harnik

Pas d'enquête sérieuse aux Etats-Unis

Ce spécialiste de la justice internationale rappelle ainsi pourquoi la CPI enquête : 

"Si la CPI s'intéresse aux éventuelles exactions commisses soit par la CIA, ou par du personnel armé, soit des Etats-Unis, soit d'Israël, que ce soit en Palestine ou en Afghanistan, c'est parce que ni les Etats-Unis, ni Israël n'ont à ce jour mené des enquêtes crédibles pour déterminer s'il y a eu des éventuels crimes de guerre commis par leurs forces armées", explique Bruno Stagno. 

Ce travail d'enquête est autorisé par le droit international. Si les Etats-Unis ne sont pas membre de la CPI et du Statut de Rome, le fait que les actes supposés se soient déroulés en Afghanistan, membre de la CPI, l'y autorise. Pour décrédibiliser les magistrats, Donald Trump et ses équipes dénoncent une cour "impartiale" et même manipulé par des forces étrangères. Un vocabulaire et des reproches utilisés là-encore par d'autres mis en cause dans d'autres affaires par le passé.

"La Cour poursuit son travail de façon indépendante et impartiale", déclare, impassible, son porte-parole Fadi El-Abdallah. Et de rappeler que la CPI est une institution judiciaire. "Le travail du bureau du procureur est contrôlé par des juges qui sont eux aussi impartiaux et indépendants. Quant aux accusations politiques, ça vient de tout bord. C'est contradictoire et n'a donc aucune valeur de vérité".

Depuis les déclarations américaines, des ONG de défense des droits de l'homme, des experts et professeurs et des acteurs du monde du droit  appellent à soutenir la CPI, que ce soit diplomatiquement ou financièrement. Le Conseil des affaires étrangères de l'Union européenne a promis de réagir. Le président de l'Assemblée des Etats parties de la CPI, O-Gon Kwon, prévoit lui,la semaine prochaine, une réunion "pour étudier comment renouveler l'engagement inébranlable des États parties envers la Cour".