"Il y a encore des cadavres autour de Mansila"
17 juin 2024Le Jnim, le Groupe de soutien à l'islam et aux musulmans, affilié à al-Qaïda, a revendiqué l'attaque de Mansila, mardi dernier, dont le bilan des victimes reste inconnu.
Cette localité est située au Burkina Faso, dans la province du Yagha, région du Sahel, c'est-à-dire non loin de la frontière avec le Niger.
Les autorités burkinabè n'ont pas communiqué officiellement sur cette attaque. Mais des vidéos circulent sur internet qui montrent des hommes à moto, des échanges de tirs, des dizaines d'armes et de munitions et des soldats faits prisonniers.
Des victimes parmi les militaires, les VDP et les civils
Des hommes armés ont fait irruption à Mansila et s'en sont pris au détachement militaire présent, mais aussi aux habitations et aux commerces locaux.
Le Jnim affirme avoir tué une centaine de soldats et de leurs supplétifs, des Volontaires pour défense de la patrie. Les combattants djihadistes prétendent aussi avoir pris le contrôle de la zone.
Cet habitant de Mansila parle, lui, de plusieurs dizaines de victimes. Il raconte que la ville s'est vidée suite aux violences. Il décrit la désolation sur place : les habitants ont fui chez des proches avant d'avoir pu compter leurs morts, recenser les disparus. Des cadavres continuent de joncher les environs :
"Actuellement à Mansila, il n'y a personne, raconte le jeune homme à la DW. "[…] Nos concessions sont brûlées, il y a eu des morts civils, VDP et militaires.[…] Les djihadistes n'ont même pas à occuper la ville, leur objectif c'était de la vider. […] Il y a des corps morts dans la nature à Mansila."
L'association des élèves et étudiants de Mansila a publié un communiqué pour rendre hommage aux victimes et demander aux autorités militaires de transition d'agir:
Ce témoin fait part aussi de la colère des habitants vis-à-vis des autorités qui n'ont, à sa connaissance, encore rien entrepris pour venir en aide aux victimes et leurs proches. Ni même communiqué sur ce massacre.
La population de Mansila, pourtant située dans une région aurifère, est durement éprouvée par les violences ces dernières années. L'armée y a aussi procédé ces derniers mois à des distributions de nourriture pour remédier aux pénuries.
Ulf Laessing, directeur du Programme Sahel de la fondation allemande Konrad Adenauer, basé à Bamako, assure, d'après les entretiens qu'il a pu avoir avec des Burkinabè à Ouagadougou et Bobo Dioulasso, que l'opinion publique soutient encore majoritairement l'armée, "malgré les échecs", au nom de la cohésion nationale.
"Les djihadistes sont arrivés au Burkina il y a quelques années et ont alors commencé leurs attaques, rappelle Ulf Laessing. C'était une erreur stratégique des gouvernements précédents d'avoir ignoré la [gravité de la] crise. (...) Le gouvernement [actuel] a commencé à acheter des armes. Il y aussi une coopération avec la Russie pour former les militaires. Ils ont également recruté 5.000 volontaires [comme supplétifs de l'armée, les VDP], mais toutes les mesures vont prendre maintenant beaucoup de temps."
La dernière fois qu'Ulf Laessing a visité Bobo Dioulasso, dans le sud du Burkina Faso, il y a vu "quelques soldats maliens". Le signe qu'une coopération militaire se mettrait bel et bien en place entre les Etats pour combattre leur ennemi commun : les groupes terroristes.