Au Burkina, un VDP de retour du front témoigne
4 avril 2024Lassané Sawadogo, jeune entrepreneur en bâtiments et travaux publiques est marié et père de sept enfants. Le jeune de 37 ans a abandonné son entreprise pour se consacrer à la lutte contre les groupes armés terroristes aux côtés des forces de défense et de sécurité du Burkina Faso.
C’est en octobre 2023 qu’il s’est enrôlé en tant que VDP pour lutter contre les groupes armés terroristes.
S’il s’est engagé c’est dit-il, pour comprendre la réalité sur les champs de combats. De retour du front récemment, Lassané Sawadogo se réserve cependant de parler de la situation qu’il a vécue.
"J’ai commencé la lutte avant l’arrivée de ce pouvoir. Notre lutte c’est de ramener l’intégrité du territoire Burkinabé aux Burkinabé et de travailler à prendre en compte les aspirations profondes du peuple Burkinabé".
Vêtu de son boubou et de son bonnet, calme et avec un regard qui en dit long sur sa détermination, Lassané regrette que les régimes précédents n’aient pas suffisamment agi dans l’équipement militaire de l’armée pour faire face aux groupes terroristes.
"Nous avons suggéré beaucoup de chose aux régimes passés qui n’ont pas été prises en compte. Dans l’armé burkinabé il y’avait le manque d’équipement militaire, de personnel militaire et d’organisation interne de l’armée", raconte Lassané.
Des complicités à l'interne
Pour Lassané, "Quand le président Ibrahim Traoré est venu, il a pris toutes ces aspirations en compte. Avant que je ne m’engage comme VDP, je me suis dit que nous parlons des problèmes de l’armée alors que nous n’avons pas les compétences et qu’est ce qui m’empêchait de m’enrôler ? C’est ce qui m’a motivé à le faire".
Mais le constat est que malgré les efforts fournis en armement et moyens mobiles, le Burkina Faso est toujours la cible des groupes armés terroristes. Bien que l’initiative de recruter des supplétifs de l’armée soit saluée par une majorité de burkinabé, certains se montrent tout de même critiques.
En effet, des experts en sécurité s’interrogent toujours sur la moralité et l’engagement réel des enrôlés. "Des complicités, oui, il en existe au sein des VDP puisqu’ayant été recrutés sous les régimes passés, donc, ils sont en contact avec certains anciens dignitaires du pouvoir", estime Lassané sawadogo.
Mais il en est certain : "Nous avons compris que les réalités du terrain sont contraires à ce qui est dit sur la place publique. Je prends un exemple des attaques que rencontrent nos FDS en général. Vous savez qu’aucune attaque ne peut se mener sans le renseignement. Que ce soit du côté ennemi et ami, la première des choses c’est d’avoir des informations nécessaires. Ça signifie que ces personnes aussi procèdent de la même manière pour attaquer nos bases. Quand on parle de complicité cela veut dire que des gens ont peut-être communiqué des informations. Quand je suis revenu, j’ai compris qu’on a un travail à faire. C’est-à-dire sensibiliser à ne pas donner la position des FDS et leurs moyens."
Lassané Sawadogo dénonce aussi une autre pratique de la part de certains chefs militaires.
"Figurez-vous que des chefs coupent des primes des VDP. Nous pensons que tout ça est démoralisant. Y’a beaucoup de chose. C’est militaire, on ne peut pas tout dire."
Lassané Sawadogo regrette toutefois que de nombreux Burkinabé aient rejoints les mouvements terroristes pour dit-il saboter la vision du capitaine Ibrahim Traoré.