Le Bénin bloque les exportations de pétrole nigérien
7 mai 2024C'était seulement le 22 avril dernier, la nouvelle avait fait la joie et la fierté des populations des deux pays. Le pétrole nigérien a officiellement coulé dans le pipeline Niger-Bénin, avec l'arrivée des premières gouttes à la station terminale de Sémé Kraté située entre les villes béninoises de Cotonou et Porto-Novo.
Une étape cruciale pour le Niger en vue de la commercialisation de son pétrole. Mais la décision des autorités béninoises de ne pas acheminer le produit vient tout changer.
Selon David Morgan, analyste politique béninois, cette décision s'appuie sur le principe de souveraineté des États et sur le fait que la partie nigérienne ait maintenu fermée sa frontière avec son voisin.
D’après lui, "cela pourrait s'inscrire dans une logique de réciprocité qui viserait à amener la partie nigérienne à ouvrir ses frontières afin que les populations de part et d'autre puissent retrouver la dynamique d'échanges qui existait depuis longtemps."
Personne n’y gagne
David Morgan reconnaît cependant que cette décision ne va pas dans le sens du bon voisinage, et ne répond pas aux exigences du droit international.
"Cette décision ne s'inscrit pas dans la logique du droit d'accès à la mer qu'impose le droit international aux Etats riverains, pour faciliter le développement des États qui se retrouvent très loin des côtes, et donc n'ont pas l'accès à la mer pour les différents échanges commerciaux", note-t-il.
Pour Régis Hounkpè, analyste géopolitique, ce blocage du Bénin "va certainement exacerber les tensions, mais il n'est pas intéressant ni pour le Niger, ni pour le Bénin de continuer dans cette démarche. Je suis convaincu que le dialogue reviendra, que la diplomatie reprendra le chemin des relations traditionnelles entre le Bénin et le Niger, et que, surtout, d'un point de vue économique, diplomatique et stratégique, ces deux pays reviennent à leurs amours d'antan."
Coup de massue pour le Niger
Bloquer le pétrole dans les eaux du Bénin est un important revers le Niger. C'est ce que pense Raoul Hounsounou, spécialiste des questions économiques, au regard des engagements qu'auraient pris les dirigeants du pays vis-à-vis des Chinois qui exploitent ce pétrole et d'autres pays potentiels bénéficiaires de ce projet.
Il rappelle que "ce pays fonde ses espoirs sur le pétrole comme le point d'orgue de sa renaissance économique. Le pays perdrait 4,2 milliards par jour si son pétrole n'est pas exporté, ce sont les chiffres qu'ils ont budgétisés. De ces 4,2 milliards par jour, il y a 0,8 dollar par barils que le Bénin perdrait. La production à exporter est de 90 mille barils par jour."
Un blocage de l'aboutissement de ce projet engendrerait en somme une perte énorme pour le Niger.