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Au Tchad, les victimes du 20 octobre attendent toujours

Blaise Dariustone
20 octobre 2023

Un an après la répression sanglante de la manifestation de l'opposition, aucun responsable des forces de l'ordre tchadiennes n'a été mis en cause.

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Une voiture de police patrouille dans les rues de N'Djamena
Un an après le drame, aucun responsable policier ou militaire n'a été inquiété Image : Sunday Alamba/AP/picture alliance

Un an après le drame, il est toujours impossible de connaître le nombre exact des victimes de cette terrible répression. Si le gouvernement tchadien parle de 73 personnes tuées lors de ces événements, l'opposition et les ONG de défense des droits humains  dressent un bilan de plus de 300 morts, des dizaines de disparus et plus de mille arrestations. Et jusque-là, aucune explication n'a été fournie sur le déroulement de ces événements. 

"Un an après ces massacres, des questions restent en suspens," déplore Délphine Kemneloum Djiraîbé est avocate et militante des droits de l'Homme. "Qui a donné l'ordre de tirer sur les manifestants ? Pourquoi les forces de défense et de sécurité ont fait usage d'une force excessive ? Pourquoi la lumière n'est-elle pas faite sur les personnes portées disparues ? Pourquoi les hommes qui ont fait usage des armes de guerre ne sont-ils pas appréhendés et jugés ? Le gouvernement n'a-t-il pas les moyens de disperser les manifestants sans utiliser les armes de guerre ? Toutes ces questions sont restées sans réponse et jusqu'à cette date, nous sommes dans une impasse politique."

"Le gouvernement considère les manifestants comme des insurgés" (S. Dorsouma)

Entêtement des autorités 

Seilou Dorsouma est président de l'Association des chrétiens pour l'abolition de la torture, section Tchad, et il déplore l'entêtement des autorités qui refusent de reconnaître la moindre responsabilité : "Ces événements sont un triste souvenir pour nous, défenseurs des droits de l'Homme, et ne vont jamais s'effacer de notre mémoire. Depuis un an, on aurait souhaité voir déjà une commission d'enquête mise sur pied et les auteurs de ces différentes infractions identifiés et poursuivis. Malheureusement, jusqu'à preuve du contraire, le gouvernement continue à considérer les manifestants du 20 octobre comme des insurgés. A l'égard de ces victimes, le gouvernement ne manifeste aucune compassion. Et c'est dans tous les discours officiels, même les morts on ne leur reconnait pas ce droit de reposer paisiblement. C'est inhumain ce que nous sommes en train de vivre aujourd'hui."

Conditions du gouvernement

Mais pour le gouvernement tchadien, l'enquête internationale au sujet de ces événements, confiée à la Communauté économique des Etats de l'Afrique centrale, suit son cours. Aziz Mahamat Saleh, le ministre tchadien de la Communication et porte-parole du gouvernement, indique que les autorités de transition sont ouvertes au dialogue pour éviter de tels drames à l'avenir : 

"L'enquête internationale de la CEEAC, le Tchad l'a demandé et bien évidemment il y a eu un certain nombre de mesures. Le chef de l'Etat congolais, le facilitateur désigné de la CEEAC, était venu à N'Djamena, des discussions continuent. Et bien, il appartient à la CEEAC de dire où en est-on avec l'enquête. Mais le gouvernement est ouvert à tout dialogue possible. Cependant, la condition que le gouvernement pose, c'est la sincérité du dialogue. Et le gouvernement mettra tout en œuvre pour éviter qu'il y ait un autre 20 octobre. Tous ceux qui veulent vraiment la réconciliation doivent saisir la main tendue du président de la transition et permettre qu'on puisse ensemble refonder le pays."

Le drame du 20 octobre 2022 a contraint plusieurs leaders de l'opposition et de la société civile à l'exil, parmi lesquels Succès Masra qui est sous le coup d'un mandat d'arrêt international de la justice tchadienne.

Vue arienne de N'Djamena
Blaise Dariustone Correspondant au Tchad pour le programme francophone de la Deutsche Welledw_francais