Tchad : cinq pistes pour réussir la transition
21 mai 2021Depuis de décès d’Idriss Déby Itno, son fils Mahamat Idriss Déby dirige le Tchad pour une période de "transition" de 18 mois, au terme de laquelle des "élections libres et transparentes" doivent être organisées. Mais des inquiétudes persistent sur un maintien éventuel au pourvoir de ce dernier à l’issue de la transition.
Pour éviter ce scénario et avoir une transition réussie, les organisations de la société civile vont devoir dans les semaines et les mois à venir concentrer leurs efforts sur au moins cinq objectifs importants.
Parvenir à obtenir une modification de la charte de la transition
Pour de nombreux observateurs, la Charte de la transition concentre trop de pouvoir aux mains de son président et n’a pas une base démocratique. Raisons évoquées : ils estiment que Mahamat Déby qui préside la transition, a la possibilité de nommer et révoquer les membres du comité militaire de transition CMT, ceux du gouvernement et du Conseil national de transition (qui jouera le rôle de l’Assemblée nationale). Le président du CMT a le pouvoir de modifier la Charte.
Limiter le temps de la transition
Selon les termes actuels de la Charte, la transition ne peut durer que 18 mois renouvelable une seule fois. Une durée trop longue aux yeux de certains membres de la société civile et de l’opposition. Ils estiment également que le caractère renouvelable peut donner lieu à une tendance à la prolongation de cette transition.
Obtenir que des responsables de la transition ne puissent pas se présenter à l’élection présidentielle
L’une des grandes inquiétudes est de voir les responsables de la transition actuelle se présenter aux futures élections qui seront organisées à l’issue de la période transitoire. Les autorités actuelles assurent, qu’elles seront " transparentes, libres et démocratiques ". Il s’agira donc de donner des garanties pour que le président de la transition Mahamat Déby ou le premier ministre Albert Pahimi Padacké, à la tête du gouvernement de transition ne se présentent pas comme candidat à ce scrutin. L’Union Afrique qui a souvent fait pression pour que ce genre de candidature soit évitée, aura un rôle à jouer selon les analystes.
Organiser le dialogue national inclusif
Ce dialogue national inclusif est promis à la fois par la charte de la transition et surtout par le ministre chargé de la réconciliation nationale et du dialogue Acheikh Ibn Oumar. Le grand défi est de parvenir à faire asseoir les protagonistes de la crise autour d’une même table dans un contexte de méfiance, de contestation et de division. Le Tchad a déjà connu plusieurs dialogues, qui n’ont pas été inclusifs du point de vue de certains et dont les décisions essentielles n’ont pas été mises en œuvre. Il y a eu par exemple en 1993, une conférence nationale souveraine. Plus récemment, en 2018 et 2020, deux " conférences inclusives " destinées à revoir la Constitution et créer la quatrième République, avaient été organisées sans la participation des principaux partis d’opposition et des responsables de la société civile.
Définir la forme, la nature et l'étendue du dialogue
Pour que le dialogue souhaité soit un succès et débouche sur des "élections transparentes, libres et démocratiques", il est important, de l’avis de plusieurs analystes, de mettre en place un organe composé de personnalités neutres, crédibles et indépendantes, chargé d’organiser les assises en concertation avec l’UA et les Nations unies. Il faudra, comme c’est souvent le cas, désigner un facilitateur international crédible qui fait l’unanimité pour établir la confiance. Enfin, il s'agit de permettre à toutes les forces (partis politiques, militaires, société civile, syndicats, diaspora, représentants religieux…) de participer.