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Tchad : les victimes d’Hissène Habré perdent espoir

Blaise Dariustone
7 février 2020

En dépit d’un jugement favorable rendu il y a cinq ans, les victimes attendent toujours d’être indemnisées. Plusieurs sont décédées et les autres commencent à se décourager. Les victimes ont manifesté ce jeudi.

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Manifestation des victimes d'Hissène Habré, ici en octobre 2019
Manifestation des victimes d'Hissène Habré, ici en octobre 2019Image : DW/B. Darustone

En mars 2015, le tribunal de Ndjamena a condamné, pour actes de tortures, les complices de Hissène Habré à la prison à vie et à verser une somme de 49 millions d’euros aux victimes. Deux ans plus tard, c’est le tribunal de Dakar qui cette fois a condamné l’ancien dictateur Hissène Habré, réfugié au Sénégal, à la prison à perpétuité et à verser des indemnités à hauteur de 50 millions d’euros. Mais près de cinq ans plus tard, les victimes n’ont reçu aucune des indemnités promises par la justice. Alors, ce jeudi 6 février, elles ont lancé une opération concert de casseroles et de sifflets devant le siège de l’association des victimes du régime de l’ancien président tchadien.

"Beaucoup sont déjà morts"

Pierre Samwa Sami Faizi, une des victimes du régime d’Hissène Habré, ne cache pas son découragement. Il explique que "parmi les victimes, beaucoup sont déjà mortes après les deux procès et il y en a qui continuent à mourir. Moi par exemple, j’ai 75 ans et est-ce que vous savez ce qui va arrivez demain ? " "On est dans l’impasse et beaucoup sont découragés", ajoute Pierre Samwa Sami Faizi.

"Nous demandons au président de la République de s’investir personnellement  pour que les droits des victimes soient respectés. Nous lui dirons certainement « merci ». Il faudrait qu’on sache exactement quand est ce que nous serons indemnisés. S’il n’y a pas d’argent, alors il n’y a pas d’argent", conclut cette victime.

Lire aussi → Tchad: les victimes de Hissène Habré attendent toujours leur indemnisation

L'Union africaine appelée à la rescousse

Clément Abaifouta, le président de l’association des victimes est aussi inquiet. Il appelle "l’Union africaine à faire en sorte que les victimes soient vite indemnisées", parce que, dit-il "125 cas de décès ont été enregistrés, sans compter les cas des maladies graves. Si l’indemnisation était arrivée à temps, ces gens auraient pu mieux se soigner et résister. Malheureusement ça piétine."

Pour sa part, Georges Henry Beauthier, l’avocat belge qui représente les victimes, leur demande de ne pas perdre espoir. "Vous savez, il y a 20 ans on m’a demandé avec d’autres avocats de faire juger Hissène Habré et ce n’était pas évident. Mais on a fini par obtenir la condamnation par une juridiction africaine sur le territoire africain d’un dictateur. C’était déjà une victoire extraordinaire saluée dans le monde", insiste l’avocat des victimes.

Pour lui il est désormais important de "gagner la deuxième manche" de l'indemnisation. "Ce n’est pas gagné mais on va de nouveau faire le pari que c’est possible. C’est la raison pour laquelle on va contacter chacun des acteurs pour faire en sorte qu’on puisse dire aux victimes : à telle échéance vous aurez tel montant", insiste Georges Henry Beauthier.

Contacté sur ce sujet, le ministre de la Justice n’a pas souhaité répondre. Des avocats américains et plusieurs organisations de défense des droits de l’homme sont déjà intervenus dans ce dossier pour réclamer, sans succès, l’application de ces deux décisions de justice.

Vue arienne de N'Djamena
Blaise Dariustone Correspondant au Tchad pour le programme francophone de la Deutsche Welledw_francais