Plongée au cœur de Takuba, la force européenne au Mali
3 septembre 2021"You will go South, out of the area 1"
Le capitaine Arthur est aux commandes. Il vient de recevoir un renseignement sur 20 djihadistes réunis à quelques kilomètres d'ici. Il faut faire vite.
Les forces spéciales estoniennes qui accompagnent, lancent leur moto tout terrain, en éclaireur. Ils feront chou blanc. Le capitaine Arthur explique la manœuvre : "Nous nous sommes déployés avec nos partenaires maliens autour d'un village sur lequel on avait des informations selon lesquelles des djihadistes se cacheraient dans la zone. Depuis que nous sommes là, nous avons alterné des dispositifs de surveillance et de patrouille mobile, le but étant de désorganiser au maximum l'activité ennemie".
Tour à tour, les forces spéciales et les militaires maliens seront épaulés par des hélicoptères et des drones pour déceler les activités suspectes. Une opération ficelée entre partenaires européens, comme l'explique Edgard : "On s'entend très bien avec les Estoniens, ils bossent super bien, ils sont très plaisants au quotidien. On partage pas mal de choses, ne serait-ce que la vie ensemble à Gao. On a beaucoup à apprendre les uns des autres, je pense".
Double objectif
Les Français ne sont donc plus les seuls Européens au Sahel. Selon le chercheur Boubacar Haïdara, cette nouvelle stratégie est double. Elle vise à ce que la France ne porte plus seule le fardeau de la guerre au Sahel, ainsi qu'à faire taire les critiques anti-France qui se font entendre depuis la fin 2019. Mais, selon lui, l'arrivée des forces spéciales n'aura pas un plus grand effet :
"On voit que la présence française patauge un peu. Pas à cause de l'incapacité de l'armée française, mais plutôt en raison de la difficulté de traiter le problème malien avec la dimension strictement militaire. On peut ramener qui on veut au Sahel, je ne pense pas qu'ils feront mieux que Barkhane aujourd'hui."
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Pour le chercheur, Barkhane est aujourd'hui un bouchon qui permet de contenir l'expansion des groupes liés à Al-Qaïda et à l'Etat islamique qui grignotent pourtant toujours plus de territoire. Et selon lui, la solution militaire aura beau être réinventée, il faudra toujours qu'elle soit couplée à des initiatives politiques.