Pourquoi, même emprisonné, Ousmane Sonko peut être candidat
31 juillet 2023Au Sénégal, Ousmane Sonko annonce qu'il entame une grève de la faim. L'opposant au président Macky Sall, candidat déclaré à la présidentielle de l'an prochain, a été interpellé vendredi dernier. Le juge d'instruction qui l'a auditionné aujourd'hui l'a placé sous mandat de dépôt. Parmi les huit charges retenues contre Ousmane Sonko figurent, entre autres, l'"appel à l'insurrection et complot contre l'autorité de l'Etat", selon un de ses avocats.
Les trois "affaires Sonko"
La première, c'est le litige qui l'oppose au ministre du Tourisme, Mame Mbaye Niang. L'opposant et leader du Pastef a été condamné début mai en appel à six mois de prison avec sursis et une grosse amende de dommages et intérêts (200 millions de FCFA). Ousmane Sonko s'est alors tourné vers la Cour suprême du Sénégal qui doit encore confirmer ou infirmer sa condamnation en appel.
Deuxième affaire : celle dite de Sweet Beauty, qui l'oppose à Adji Sarr. En juin, Ousmane Sonko a été condamné par contumace à deux ans de prison ferme pour « corruption de la jeunesse. Il n'avait pas été arrêté, simplement placé en résidence surveillée.
Et enfin la troisième affaire, qui lui a valu d'être interpellé vendredi dernier : le Parquet poursuit l'opposant pour huit infractions, dont, vous l'avez dit, l'"appel à l'insurrection et complot contre l'autorité de l'Etat". Suite à quoi il a été placé sous mandat de dépôt et l'instruction va commencer.
Ensuite seulement, un procès pourra avoir lieu. En cas de condamnation, Ousmane Sonko pourra faire appel. Et s'il le souhaite, il pourra là encore se pourvoir en cassation s'il n'est pas satisfait de l'éventuel jugement de la cour d'appel.
Pas encore de condamnation définitive
Pourtant, en vertu du droit sénégalais, Ousmane Sonko peut resté candidat à la présidentielle de 2024 car ces trois affaires sont encore pendantes devant la justice. C'est-à-dire qu'Ousmane Sonko n'a pas épuisé tous les recours à sa disposition ; en d'autres termes, ses condamnations ne sont pas définitives.
Donc même son arrestation n'a pas d'incidence sur sa candidature : faire l'objet de poursuites pénales n'empêche pas de se présenter aux élections.
Dissolution du Pastef
Néanmoins, ce soir, le gouvernement sénégalais annonce la dissolution du parti d'Ousmane Sonko, le Pastef. C'est le ministre de l'Intérieur Antoine Diome qui l'a annoncé, justifiant sa décision par les appels "fréquents" du pastef à des "mouvements insurrectionnels" qui ont fait selon lui de nombreux morts en mars 2021 et juin 2023.
Selon les autorités, 16 personnes sont mortes dans la répression des manifestations en soutien à Ousmane Sonko depuis le début de ses ennuis judiciaires. L'opposition parle, elle, d'une trentaine de morts dans le pays.
Hier [30.07.23], Ousmane Sonko a appelé ses partisans, sur les réseaux sociaux, à "rester debout" et à "résister".
Il se pourrait donc que le "cas Sonko" continue de mobiliser l'opinion publique au Sénégal. Devant les tribunaux comme dans la rue.
Suspension d'internet sur les téléphones
Les autorités sénégalaises ont annoncé aussi à compter de ce lundi la suspension temporaire des accès à internet sur les téléphones portables via les données mobiles. Une décision motivée par la "diffusion de messages haineux et subversifs" sur les réseaux sociaux suite à l'arrestation d'Ousmane Sonko.
La présence policière a été renforcée dans tout Dakar. La coalition de l'opposition Yewwi Askan Wi avait appelé les partisans d'Ousmane Sonko à se regrouper devant le grand tribunal de la capitale où Ousmane Sonko devait être auditionné. Dans la matinée, des manifestants avaient bloqué l'autoroute à péage.