"Les réfugiés congolais pourront rester"
11 janvier 2023Le porte-parole adjoint du gouvernement rwandais, Alain Mukuralinda, joue l'apaisement après les réactions qui ont suivi les propos du président rwandais sur les réfugiés congolais.
Selon Alain Mukuralinda, Paul Kagame est toujours prêt à accueillir au Rwanda les réfugiés venant de la RDC ou d'ailleurs, conformément aux engagements internationaux du pays, mais il réclame que le problème soit abordé, au niveau international, "dans sa globalité".
Ecoutez ci-dessous l'interview avec Alain Mukuralinda
Alain Mukuralinda : Alors non, le Rwanda ne ferme pas ses portes. En fait, il faut que la phrase soit remise dans son contexte. Premièrement, le président [Paul Kagame] n'a pas dit que le Rwanda n'allait plus accueillir les réfugiés. Parce que d'abord, ce serait contraire à toutes les conventions auxquelles le Rwanda a adhéré concernant les réfugiés et auxquelles le Rwanda tient toujours.
Et puis, deuxièmement, ce serait même contraire à notre culture qui exige de nous d’accueillir toute personne qui est dans le besoin. Mais ce qu'il a voulu dire, c'est que dans la situation actuelle, ceux qui fuient sont victimes d'un nettoyage ethnique.
Donc les frontières sont ouvertes, les réfugiés peuvent toujours venir et ceux qui sont ici ne seront pas renvoyés dans leur pays tant qu'ils ne se sentent pas en sécurité.
DW: Que réclame concrètement le président Kagame?
Tout le monde, à commencer par le gouvernement congolais et la communauté internationale, est au courant. Tout le monde sait pourquoi ces gens fuient leur région, leur pays natal, mais tout le monde fait semblant d'ignorer et donc chacun évite ses responsabilités et tout est mis sur le dos du Rwanda.
C'est dans ces conditions qu[e le président Kagame] a dit : "Vous l’ignorez, alors que c'est fait au vu et au su de tout le monde". Le Rwandais ne devrait plus subir cette charge tout seul.
Ce que le gouvernement du Rwanda demande, c'est de prendre dans la globalité tout le problème et d’essayer de les résoudre et non plus seulement de parler d'un seul mouvement [armé = le M23]. Alors qu'on nous parle de plus de 100 mouvements qui pullulent dans l'est de la RDC, vous ne faites que parler du Rwanda et du M23 alors qu'il y a plus de 75 000 personnes qui ont fui leur pays, qui sont ici depuis 20 ans et vous n'en dites pas un mot, vous ne réagissez pas.
DW : Mais est-ce que le dialogue est rompu avec la RDC ?
Non, le dialogue n’est pas rompu entre le gouvernement rwandais et le gouvernement congolais. Oui, c'est vrai qu'on a expulsé l'ambassadeur, mais les ambassades ne sont pas fermées. Et puis aussi, on peut dialoguer à travers la communauté de l'Est.
Non, le dialogue n'est pas rompu et d'ailleurs je pense qu'il y a des réunions qui sont prévues pour essayer de trouver une solution. Même dans la dernière résolution de Luanda, on avait dit que 60 jours après la signature, les présidents et les leaders allaient voir comment essayer de concilier et de rapprocher le Rwanda et la RDC. Donc non, le dialogue n'est pas rompu.
DW : Et une dernière chose : aujourd'hui, les autorités rwandaises réfutent toujours tout soutien au M23 ?
Oui, on le réfute parce que, comme on vous l'a dit, le Rwanda n'a pas besoin du M23 pour maintenir sa sécurité comme le M23 n'a pas besoin du Rwanda pour revendiquer ce qu'il revendique par rapport à son gouvernement. Ça revient à ce que le président a dit : "Prenez le problème dans sa globalité". Nous avons un problème entre Congolais. On l'a toujours dit. Heureusement que dernièrement, dans la dernière résolution de Luanda, cela se reflète dedans parce que avant, ce n'était pas comme ça. Le gouvernement congolais disait que ces gens doivent retourner d'où ils sont venus, ce qui signifie qu'ils doivent retourner au Rwanda. Mais ces gens ne sont pas des Rwandais et ce qu'ils veulent, c'est rester chez eux en paix.
Maintenant que cela se reflète dans la décision de Luanda, c'est contradictoire. Les gens disent qu'ils veulent rentrer chez eux, les gens [M23] disent qu'ils ont des revendications à propos de leur gouvernement [congolais], et d'un autre côté, nous avons le gouvernement congolais qui les traite de terroristes. Nous avons certains pays européens qui commencent à condamner alors que dans le même rapport, on nous parle aussi de la collaboration, au vu et au su de tout le monde, des FARDC [= armée congolaise] avec différents groupes armés contre qui elles devraient combattre.
Donc aujourd'hui, il faut parler de tout le problème dans sa globalité et non pas seulement d'une petite partie du problème et qui est aussi erronée.