Fin de l'accord sur l'exportation des céréales
18 juillet 2023Moscou estime que l'accord n'a pas permis de lever les entraves et sanctions pesant sur ses propres exportations de céréales et d'engrais. La fin de cet accord, qui permettait le transfert des produits agricoles hors de l'Ukraine malgré la guerre et le blocus imposé par la Russie, est bien entendu suivi de près dans plusieurs régions du monde, et notamment en Afrique, puisque cette situation a des conséquences sur la sécurité alimentaire de nombreux pays.
Un impact mondial
En un an, 33 millions de tonnes de céréales, essentiellement du maïs et du blé, ont ainsi pu quitter les ports ukrainiens, ce qui a contribué à stabiliser les prix alimentaires mondiaux et à écarter les risques de pénurie.
Mais, le refus de Moscou de prolonger l'accord sur l'exportation des céréales aura désormais un impact désastreux, a expliqué, sur la radio publique allemande Deutschlandfunk, Martin Frick, responsable du bureau du Programme alimentaire mondial à Berlin.
Selon lui : "Nous avons une situation actuelle où 3,5 millions de personnes dans le monde sont en situation d'insécurité alimentaire extrême et la coupure d'un filon capital des exportations alimentaires mondiales aura bien sûr un impact immédiat sur les prix et touchera les personnes qui dépensent déjà la majeure partie de leurs revenus pour les aliments de base. Nous prévoyons donc que les taux de famine continueront d'augmenter et que davantage de personnes ne pourront plus se procurer des aliments de bases".
Martin Frick, rappelle par ailleurs que ce sont plusieurs régions du monde qui sont menacées : "Nous avons nos pays, dont nous devons bien sûr nous occuper le plus. La Corne de l'Afrique, où 2,3 millions de personnes sont en situation d'insécurité alimentaire aiguë en l'absence de saison des pluies. C'est le monde entier... c'est l'Afghanistan. On ressent les ondes de choc d'une telle perturbation partout dans le monde, jusqu'en Amérique latine. Nous avons actuellement plus de 70 pays qui ont des personnes extrêmement vulnérables sur le plan nutritionnel".
"La faim comme une arme"
Depuis l'annonce de la fin de l'accord sur l'exportation des céréales, plusieurs dirigeants occidentaux ont dénoncé l'attitude de Moscou.
La ministre allemande des Affaires étrangères, Annalena Baerbock, reproche par exemple au président russe Vladimir Poutine d'utiliser "la faim comme une arme". Selon elle, il faut continuer à faire pression sur Moscou.
"Je crois qu'il serait bien que les pays d'Afrique, d'Amérique latine, d'Asie s'adressent directement à Poutine. Nous avons vu l'année dernière que cela fait une différence si d'autres pays du monde, et pas seulement des pays européens, font appel à Poutine et comment il utilise en fait les plus vulnérables du monde dans cette guerre en ne laissant pas la nourriture aller vers eux " a-t-elle précisé à la DW.
Annalena Baerbock insiste sur le fait que les occidentaux ne peuvent pas compter uniquement sur la bonne volonté de Poutine. Elle rappelle ainsi que l'Union européenne a aidé à acheminer en Europe les céréales ukrainiennes par chemin de fer et également par cargo sur le Danube, pour ensuite les exporter vers le reste du monde.