RDC : les consultations de Nairobi mises à rude épreuve
25 avril 2022La réunion entre les représentants de huit groupes armés et ceux du pouvoir de RDC ont démarré au lendemain du mini-sommet de la Communauté de l'Afrique de l'est dans la capitale kényane et qui a réuni les présidents du Kenya, du Burundi, d'Ouganda et de RDC, ainsi que le ministre des Affaires étrangères du Rwanda. Mais la médiation du Kenya est mise à rude épreuve, car l'armée congolaise signale des accrochages avec un des groupes armés invités à la table du dialogue.
La rébellion du Mouvement du 23 mars, M23, était pourtant représentée à la première journée des discussions le 23 avril. Ironie du sort, c'est ce même jour qu'ont éclaté, à Rutchuru, des combats entre l'armée congolaise et une branche du M23. La délégation congolaise a donc exigé et obtenu de la médiation kényane, l'expulsion des délégués de ce groupe armé.
"Les parties avaient convenu qu'au moment où se tiennent ces consultations, ici, les armes devraient se taire. L'attitude du M23- Makenga était donc incompatible avec la volonté affichée par les chefs d’État. Voilà pourquoi, la délégation présidentielle avait demandé et obtenu l'expulsion de ces groupes armés. Parce qu’on ne peut pas comprendre qu'ils s'engagent dans les deux voies qui sont complètement incompatibles", explique à la DW Giscard Kusema, directeur adjoint de la communication présidentielle congolaise et l'un des experts participant aux consultations à Nairobi.
Risques politiques
Les combattants du M23 ont expliqué avoir agi par légitime défense. Ce que Kinshasa dément. Le président Félix Tshisekedi a pris d’énormes risques politiques en acceptant ces consultations avec ces rebelles, car la démarche est impopulaire en RDC, regrette Boniface Musavuli, chercheur congolais spécialiste des questions de défense et sécurité.
"Elles aboutissent à des mécanismes de brassage et de mixage qui se traduisent par l’intégration à l’intérieur de l’armée congolaise des éléments douteux et des criminels de guerre. Avec pour conséquences d’affaiblir l’armée face aux défis de la sécurité. Félix Tshisekedi prend un énorme risque d’impopularité en acceptant ce genre de négociations avec les groupes armés et surtout avec les groupes armés qui sont liés au Rwanda et à l’Ouganda", ajoute Boniface Musavuli.
Deux options au choix
Selon Giscard Kusema, les rebelles ont deux options pour faire taire les armes.
"La toute première, c'est de donner cette chance à tous les groupes armés locaux et étrangers de procéder à une reddition inconditionnelle. Et il est donc clair que les groupes armés qui ne vont pas déposer les armes, la force militaire conjointe comprenant les armées du Kenya, du Rwanda, du Burundi, de l'Ouganda vont les y contraindre."
Le secrétaire général des Nations unies, António Guterres, a exhorté tous les groupes armés locaux en République démocratique du Congo à participer sans condition au processus politique, et tous les groupes armés étrangers à désarmer et à retourner sans condition et immédiatement dans leur pays d'origine.
Boniface Musavuli soutient que pour ramener la paix dans l'est du Congo, le président Félix Tshisekedi doit travailler avec le gynécologue Denis Mukwege, mais pas avec les groupes armés. La paix doit reposer sur l'exigence de justice pour les victimes et passe par la création d'un tribunal pénal international pour le Congo, comme le réclame Denis Mukwege, prix Nobel de la Paix 2018.
Le Mouvement du 23 mars a été défait en octobre 2013 par les forces armées congolaises (FARDC). Il est réapparu l’année dernière dans l’est de la RDC. Ces dirigeants accusent les autorités de Kinshasa de ne pas avoir respecté des engagements sur la démobilisation de leurs combattants.