Qui en veut au Hezbollah ?
16 août 2013L'attaque dirigée jeudi contre le mouvement chiite libanais du Hezbollah a été revendiquée par un nouveau groupe islamiste d'obédience sunnite : les « Brigades d'Aïcha ».
Les « Brigades d'Aïcha » sont un groupe encore peu connu, qui pourrait regrouper des salafistes libanais et syriens. Courant juillet, ce mouvement avait déjà revendiqué une attaque dirigée contre le Hezbollah. En fait, les sunnites du nord du Liban se radicalisent depuis le début du conflit en Syrie. Ils ne reconnaissent pas l'autorité du chef de l'opposition libanaise, Saad Hariri, l'un des fils de l'ex-premier ministre assassiné en 2005, et qui possède les deux nationalités, libanaise et saoudienne.
Depuis plusieurs mois, les violences se multiplient en territoire libanais et des groupes, comme les « Brigades d'Aïcha » et l'engagement du Hezbollah en Syrie, au côté des troupes de Bachar el-Assad n'a pas calmé le jeu. Les autorités libanaises, elles, soupçonnent Israël de soutenir les attaques contre le Hezbollah pour faire sombrer les différentes confessions présentes au Liban dans une guerre civile.
Inimitiés profondes
Si le Hezbollah est particulièrement visé, c'est parce qu'il s'est érigé en acteur important de la politique au Liban, qui bénéficie d'appuis conséquents dans la région…et qu'il suscite de ce fait de nombreuses animosités.
La branche armée du Hezbollah, la « Résistance islamique » a été créé en 1982, en réaction à l'invasion du Liban par les troupes israéliennes. Une création soutenue à l'époque par des fonds iraniens. Mais le Hezbollah ne deviendra vraiment visible qu'au milieu des années 1980. Le Hezbollah et son chef actuel, Hassan Nasrallah, ont longtemps prôné la destruction de l'Etat Israël, et bénéficient principalement du soutien indéfectible de l'Iran et, plus en pointillés, de la Syrie, les deux grandes puissances chiites de la région et ennemies jurées de l'Etat hébreu. Israël dément pour sa part toute implication dans l'attentat de Beyrouth.
Distinguer activités militaires et politiques?
Les Etats-Unis, alliés de l'Etat hébreu, estimaient en juin 2010 que le Hezbollah était « l'une des milices les mieux armées et les plus dangereuses dans le monde », avec un effectif estimé de plusieurs milliers de combattants. L'Union européenne a décidé en juillet de placer l'aile militaire du Hezbollah sur la liste des organisations terroristes, mais les Etats européens sont divisés sur l'attitude à adopter vis-à-vis de la branche politique du mouvement, qui siège au Parlement depuis 2005.
Fin juillet 2013, l'Arabie saoudite, le Qatar, Bahrein, le Koweit, Oman et les Emirats arabes unis ont placé le Hezbollah sur leur liste noire. L'ONU ne le considère pas officiellement comme un groupe terroriste, mais appelle à son désarmement.
Cristallisation des rivalités régionales
Depuis 2009, Hassan Nasrallah a pourtant modéré son discours. Désormais, il ne revendique plus ouvertement l'établissement d'une république islamique. Mais cela n'empêche pas des combattants du Hezbollah de continuer la lutte armée. La guerre de 2006 contre Israël reste dans toutes les mémoires. Or le Hezbollah contrôle environ 10% du territoire libanais, dans le sud du pays et une reprise accrue de ses activités militaires de son armée pourrait enflammer de nouveau le Proche-Orient.
Depuis ce qu'on a appelé les « printemps arabes », les rapports de force se durcissent dans la région. Les autorités libanaises suspectent des états voisins de comploter pour semer la « fitna », c'est-à-dire la division entre les confessions représentées au Liban.