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"On ne peut pas faire oublier le passé au Rwanda"

27 mai 2021

Interview avec Gerd Hankel, chercheur allemand, qui analyse la visite d'Emmanuel Macron à Kigali.

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L'ONU estime qu'environ 800.000 personnes ont été tuées durant le génocide de 1994 au Rwanda
L'ONU estime qu'environ 800.000 personnes ont été tuées durant le génocide de 1994 au RwandaImage : Getty Images/AFP/Y. Chiba

C'est donc pour un nouveau départ dans les relations Paris-Kigali qu'a plaidé aujourd'hui le président français, Emmanuel Macron, dont la visite survient après plus de deux décennies de tensions.

>>> A lire aussi : De nouvelles bases pour la relation Rwanda - France

Le président français s'est cependant abstenu de présenter des excuses. Et le président rwandais Paul Kagame a, lui, estimé que les propos de son homologue français valaient "plus que des excuses".

>>> A lire aussi : Macron au Rwanda: "Je viens reconnaître nos responsabilités"

Pour Gerd Hankel, il s'agit d'une visite historique. L'expert allemand de l'Institut de recherches sociales de Hambourg, qui est aussi un connaisseur de la région des Grands Lacs, décrypte les deux discours prononcés à Kigali en insistant sur l'absence d'excuses.  Ecoutez ci-contre l'analyse de Gerd Hankel, dont voici une retranscription partielle : 

Ecoutez l'interview avec Gerd Hankel

Gerd Hankel : On ne peut pas faire oublier le passé. Les propos rwandais accusant en bloc la France d'être non seulement complices, mais auteurs du génocide. Et puis, de l'autre côté, les propos français déclinant, niant en bloc toute responsabilité. On ne peut pas faire oublier tout ça, mais on peut choisir une autre démarche, une démarche constructive et qui s'exprime par la visite d'Emmanuel Macron à Kigali.

DW : Cette visite sera suivie dans les prochains jours, peut être, de l'envoi d'un ambassadeur français au Rwanda. Mais Emmanuel Macron a tout de même reconnu des responsabilités lourdes côté français. Il a évité de présenter des excuses. Est-ce que vous avez l'impression que le président français a choisi les mots qu'il a prononcés à Kigali ?

Gerd Hankel : Ah oui, certainement. Parce que présenter des excuses reviendrait à mon sens à reconnaître une responsabilité pénale, une culpabilité criminelle qui pourrait avoir pour conséquence que l'on traduise en justice les hommes politiques ou des hommes politiques ou militaires français. 

DW : Ou impliquer des dédommagements ?

Gerd Hankel : Oui peut être aussi. Et puis présenter des excuses à qui ? Au président Kagamé ? Non ! Au gouvernement rwandais ? Non. A ceux qui ont souffert, bien évidemment, donc aux rescapés du génocide des Tutsis et aux familles des Hutus massacrés pendant et après le génocide. Là, ça serait une bonne idée. Mais présenter des excuses au Rwanda ? Non.

DW : En répliquant au discours d'Emmanuel Macron, Paul Kagame a dit que les propos de son homologue valaient "plus que des excuses". Mais le président Macron s'est abstenu quand même de présenter des excuses. Comment comprendre cet échange ?

Gerd Hankel : Le président Kagame est un homme intelligent. Il sait qu'en politique, ce qui compte, ce sont les gestes. Donc, Emmanuel Macron est là, il est sur place à Kigali, ça revalorise la conception officielle rwandaise du génocide. Donc, pour Kagame, c'est un acquis politique énorme.

Photo de Fréjus Quenum, en interview dans le studio de la Deutsche Welle à Kinshasa en RDC (05.12.2024)
Fréjus Quenum Journaliste, présentateur et reporter au programme francophone de la Deutsche Welle@frejusquenum