Mali : sombre tableau des droits de l'Homme
8 avril 2024Alioune Tine a aussi souligné la hausse des violences dans le pays. Mais, l'expert indépendant de l'Onu a rencontré beaucoup d'écueils dans la rédaction de son rapport. Il n'a par exemple pas été autorisé par les autorités maliennes de la transition à séjourner dans le pays. Pour rédiger son rapport, l'expert s'est fondé sur des informations mises à sa disposition par divers acteurs de la vie politique et sociale du Mali.
Préoccupé
Dans son rapport, celui-ci s'est ainsi déclaré "profondément préoccupé" par la dissolution d’organisations de la société civile au Mali, et plus largement par des "restrictions croissantes" aux droits humains et aux libertés fondamentales.
"C'est une répression systématique de toutes les libertés fondamentales, la liberté de presse, la liberté d'expression, la liberté d'association, la liberté de réunion. Tout est interdit. Sans compter maintenant aussi l'emprisonnement pour délit d'opinion", affirme-t-il au micro de Fréjus Quenum.
Impératifs de sécurité
Pourtant, les militaires à la tête du pays justifient cette situation par des impératifs de sécurité.
Face à cela, l'expert indépendant de l'Onu, Alioune Tine, affirme que la sécurité ne s’améliore pas au Mali.
Selon lui, "les attaques contre les civils continuent, les attaques contre l'armée malienne continuent. Les exactions continuent contre les civils. Les civils sont souvent pris entre le marteau et l'enclume. Le marteau des djihadistes et l'enclume à la fois de l'armée malienne et de Wagner".
Par ailleurs, toujours selon ce rapport, entre novembre et décembre 2023, le nombre d’écoles fermées pour cause d’insécurité et de crise humanitaire a augmenté de 2,6%.
Cette situation prive près de 495.000 enfants de leur droit à l’éducation, ce qui représente, je cite, "une véritable bombe sociale à l’horizon".
Les autorités, alertés
L'avocat et ancien ministre malien de la Justice, maître Mamadou Ismaïla Konaté interpelle les militaires qui dirigent le Mali.
"Tout cela aujourd'hui doit être une alerte pour les autorités nationales. Qu'elles soient capables d’en prendre conscience, puisque c'est une situation qui ne peut pas perdurer. Un jour ou l'autre, ils seront obligés de rendre des comptes. Un jour ou l'autre, ils seront obligés de se démettre. Et un jour ou l'autre, la souveraineté qui appartient au peuple du Mali reviendra au peuple du Mali", déclare à la DW maître Mamadou Ismaïla Konaté.
Pour sa part, Alioune Tine estime que la communauté internationale a échoué dans la mission d'assurer à la fois la paix, la sécurité et la stabilité au Mali, tout comme l'opération militaire française Barkhane, la Cédéao et l'Union africaine.
La DW n'a pas réussi à joindre les autorités maliennes de la transition. Fousseynou Ouattara, le vice-président de la commission Défense et Sécurité du Conseil national de transition, le nom de la junte au pouvoir, a pour sa part affirmé qu’il existe beaucoup d'incohérences dans le rapport présenté devant le Conseil des droits de l'Homme de l'Onu par l'expert indépendant Alioune Tine.