Mali : l'ancien président IBK est mort
16 janvier 2022L’ancien président du Mali de 2013 à 2020 Ibrahim Boubacar Keïta est décédé à l’âge de 76 ans. La cause du décès d'IBK n'a pas été précisée.
"Le président IBK est décédé ce matin à 09H00 (GMT et locales) à son domicile" dans la capitale, où il vivait retiré, à l'écart de la vie publique, a indiqué à l'AFP un membre de sa famille.
Selon Moussa Timbiné, président de l’assemblée nationale dissoute, s’est dit "très attristé par cette disparition brutale". Sur la DW, Moussa Timbiné pense que IBK était un "homme d’Etat qui a toujours été au chevet du Mali, qui s’est toujours battu pour le déveloopement du Mali". Présent au domicile de Bamako d’IBK après la mort de ce dernier, Moussa Timbiné, proche par ailleurs de l’ancien président malien, ajoute que le Mali a perdu un baobab. "C’est toute la nation qui pleure Ibrahim Boubacar Kéïta", a-t-il dit à l’un de nos correspondants à Bamako Paul Lorgerie.
Après avoir suscité une vague d’espoir d’un retour à la paix, Ibrahim Boubacar Kéïta a été renversé par un putsch militaire, au terme de manifestations qui réclamaient son départ. Retour sur une carrière qui a épousé les soubresauts du Mali.
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"Nous avons mis en place un programme de sécurisation intégrée du centre. Nous avons compris qu’il nous fallait reconquérir ces territoires-là. Pas seulement manu militari mais aussi sur le plan politique. Faire en sorte que l’administration revienne en ayant la capacité d’agir pour satisfaire les besoins sociaux élémentaires : en termes de santé, d’école et de voies d’accès. Car si vous ramenez les gens [dans le giron de l’Etat] il faut qu’ils soient rassurés qu’il y a une autorité capable de leur venir en aide en cas de danger."
Premières manifestations
Des propos d’Ibrahim Boubacar Keïta, tenus lors d’une interview à notre programme en février 2019, qui sonnent, avec le recul, étrangement prémonitoires.
Car c’est justement ce problème des infrastructures et des routes dans les régions enclavées qui a été à l’origine des premières manifestations en 2020, celles qui ont abouti à la création du M5-RFP, et qui ont valu à IBK d’être renversé par l’armée.
Ibrahim Boubacar Keïta est né le 29 janvier 1945 à Koutilala, ville cotonnière du sud. Après avoir été au lycée à Bamako, il part étudier à Paris, à la Sorbonne, l’histoire, les sciences politiques et les relations internationales.
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C’est seulement à l’âge de 41 ans qu’Ibrahim Boubacar Keïta rentre au Mali, où il travaille pour un programme de développement européen avant d’être représentant de l’ONG Terre des hommes pour le Mali, le Burkina Faso et le Niger.
En 1990, il fonde l’Adema (Alliance pour la Démocratie au Mali), pour s’opposer au dictateur alors en place : Moussa Traoré.
Sous la présidence d‘Alpha Oumar Konaré, il devient ambassadeur en Côte d’Ivoire puis ministre des Affaires étrangères et enfin Premier ministre.
Homme à poigne
Sa résistance à plusieurs mouvements de grève, entre 1994 et 2000, lui valent d’être considéré comme un politicien à poigne.
En 2000, les dissensions au sein de l’Adema sont telles qu’IBK démissionne de ses fonctions de chef du gouvernement puis de la présidence du parti.
Il fonde alors le Rassemblement pour le Mali (RPM) et arrive troisième à la présidentielle de 2002, remportée par Amadou Toumani Touré.
Nouvel échec en 2007, qui scelle la réélection d’Amadou Toumani Touré. Mais en 2012, ce dernier est renversé par les mutins qui protestent contre leur mauvais équipement et leur mauvaise préparation dans la guerre contre les groupes armés dans le nord.
Après la période de transition, Ibrahim Boubacar Keïta est élu président en 2013. Il promet de rétablir le Mali dans son rôle de modèle de démocratie en Afrique de l’ouest, il prône une politique de "tolérance zéro" vis-à-vis de la corruption.
Mais en dépit du renfort des troupes internationales, les autorités maliennes ne parviennent pas à sécuriser le nord et le centre du pays. Plusieurs fois, l’armée des FAMA est accusée d’atrocités, de massacres.
Cela n’empêche pas les Maliens de réélire Ibrahim Boubacar Keïta en 2018 pour un deuxième quinquennat, en dépit des protestations de son rival, Soumaïla Cissé, qui dénonce des fraudes.
La stabilité du Mali
IBK fait du retour à la stabilité son cheval de bataille. C’est son argument pour prendre la défense du franc CFA, pourtant hérité de la colonisation.
"Nous avons des échanges assez fluides et aussi une stabilité que beaucoup nous envient. Je pense qu'entre la stabilité et l'instabilité, il faut la stabilité."
Quand l’armée le destitue le 18 août 2020, IBK déclare à la télévision nationale : "Je dois me soumettre, je veux éviter un bain de sang."
Fait prisonnier puis relâché par la junte, l’ancien président part aux Emirats arabes unis pour recevoir des soins médicaux.
Après sa destitution, il s’était retiré de la vie publique et politique et n’est pas intervenu dans le débat sur les contours de la transition.