L'Érythrée redeviendrait-elle fréquentable ?
8 septembre 2016Cette visite est importante pour le gouvernement érythréen. Deux ministres et le conseiller direct du président ont fait le déplacement jusqu'en Allemagne. Officiellement, ils viennent participer à un forum économique et à une soirée-débat et devraient rencontrer des députés. Le ministère allemand de la Coopération annonce que cette visite "est l'aboutissement de négociations politiques menées par le ministre Gerd Müller en décembre dernier à Asmara". Berlin souhaite aider à améliorer les conditions de vie sur place. "Nous devons faire très attention à ne pas seulement endiguer l'émigration des Erythréens vers l'Allemagne et l'Europe, sans que rien ne change en matière de droits de l'Homme dans le pays", prévient Kordula Schmitz-Asche, députée écologiste du Bundestag.
Un service militaire à vie
L'exode des Erythréens est massif, pour fuir notamment le service militaire obligatoire qui s'apparente à du travail forcé au service de l'État. Mais aucune visite d'observateurs indépendants n'est autorisée dans le pays. 25 000 ressortissants ont demandé l'asile en Allemagne en 2015, et 200 000 attendent au Soudan et en Ethiopie, pays voisins de l'Érythrée. Nicole Hirt, de l'Institut GIGA, de Hambourg, pense que "les Européens espèrent qu'avec un peu d'investissements dans le pays, les habitants ne seront plus contraints au service national et ne voudront donc plus partir. C'est tout bonnement naïf de croire cela, je ne pense pas que les autorités erythréennes ont l'intention de changer de politique."
Un pays fréquentable ?
Cela fait des années que l'Erythrée est isolée sur le plan diplomatique. En 2007, l'Allemagne a suspendu son aide au pays. Les Nations unies reprochent au gouvernement d'Asmara de graves violations des droits de l'Homme : esclavage, torture, viol, assassinat sont monnaie courante. En juin dernier, le président d'une commission d'enquête onusienne dévolue à l'Erythrée concluait laconiquement: "l'Erythrée est un régime autoritaire, sans justice indépendante, sans parlement, sans institutions démocratiques". Pourtant, l'UE a décidé de renforcer sa coopération avec l'Erythrée pour la protection des frontières. Et l'Allemagne de renouer le dialogue avec Asmara.