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Les wazalendo sont devenus les alliés de l’armée congolaise

6 mars 2024

Les wazalendo composés de diverses milices ayant combattu l’armée congolaise se retrouvent désormais à ses côtés face au M23.

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Images de milices APCLS en RDC
Les wazalendo sont composés de plusieurs milices.Image : GUERCHOM NDEBO/AFP

Tout a commencé après l’appel lancé par le président congolais, Félix Tshisekedi, en novembre 2022. Un appel pour que les jeunes femmes et les jeunes hommes organisent des " groupes de vigilance " et soutiennent l’armée congolaise contre le M23

Le 3 septembre 2023, un décret du gouvernement de la RDC légalise ainsi la présence des milices au sein des FARDC, les forces armées congolaises. 

Un grand nombre de milices locales, sur les plus de 120 groupes armés présents dans l’est de la RDC, comme les Maï-Maï et les Nyatura, s'allient alors à l’armée sous la bannière des wazalendo

Fait troublant : selon le rapport des experts de l’Onu, on trouve parmi les wazalendo des éléments des Forces démocratiques de libération du Rwanda, les FDLR-Foca, un groupe armé qui affirme défendre les intérêts des hutus réfugiés en RDC et qui est opposé au président rwandais Paul Kagamé.

Un soldat congolais tenant une arme
Plus de 40 000 nouvelles recrues ont intégré les rangs des forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC), selon Kinshasa.Image : Tom Peyre-Costa/NRC

"La majeure partie de ces groupes, qui se font appeler wazalendo, étaient des groupes armés traqués par les FARDC dans le temps par les opérations Sokola 1 et 2 et qui se sont ralliés à la cause de l'Etat", explique Josaphat Musamba, chercheur en dynamique des groupes armés. 

Celui-ci ajoute que "tous n'ont pas fait l'armée, mais parmi eux, il y en a qui sont des anciens militaires. Certains ont déserté les rangs de l'armée. Mais ce qui est évident, c’est que la majeure partie sont des jeunes qui se sont formés à la culture de combat."

Atouts des wazalendo

Les wazalendo sont d’anciens rebelles qui, devenus utiles pour combattre le M23, notamment en raison de leur connaissance du terrain, se sont convertis en supplétifs de l’armée congolaise

"Le terrain de guerre dans l'est de la RDC n'est pas très facile, ou pas très accessible, dû à des questions de terrain, d'infrastructure, etc… Donc les unités combattantes qui connaissent bien les contrées, ou bien les endroits où elles font des opérations, ont parfois un avantage", affirme Christoph Vogel, cofondateur de l’institut de recherche Ebuteli en RDC.

"Et il est vrai aussi qu’en raison de questions d'arriérés de salaires ou de difficultés socio-économiques au sein de l'armée nationale, on mise justement sur ces wazalendo pour profiter d'une forte motivation intrinsèque dans ces hostilités", conclut Christoph Vogel. 

Les wazalendo espèrent donc gagner en légitimité pour intégrer un jour les FARDC. D’ailleurs plusieurs groupes de ces milices locales ont appelé à voter en faveur de la réélection de Félix Tshisekedi avant le dernier scrutin de décembre 2023.

Mais tous ne pourront pas être intégrés dans l’armée, estime Josaphat Musamba.

"Je doute que les militaires acceptent cela parce que, à l'intérieur, les FARDC qui ont suivi des formations, et qui estiment que les anciens rebelles ne doivent pas rejoindre le rang des FARDC, vont contester. Parfois, il y a des contestations, même s’ils ne le disent pas très ouvertement."

Des manifestants contre le M23 tenant des pancartes hostiles
La guerre contre le M23 a forcé près de 7 millions de Congolais à s’enfuir de leur foyer, provoquant ainsi l’une des plus graves crises de déplacements internes au monde.Image : GUERCHOM NDEBO/AFP

Le chercheur en dynamique des groupes armés insiste qu'"il y ait surtout une loi qui va réglementer les questions des réserves de l‘armée. Qui devra intégrer l’armée, comment vont-ils faire la sélection, comment est-ce qu'ils vont assurer que tous ceux qui viennent n'ont pas tué, n'ont pas violé… ?" 

Le sort réservé à ceux qui ne pourront pas intégrer les FARDC

Pour Christoph Vogel, le processus de désarmement, démobilisation et réintégration ayant montré ses limites, les wazalendo risquent de devenir un vrai problème, autant pour Kinshasa que pour les civils.

"Globalement, à quelques exceptions près, toutes ces initiatives aussi de démobilisation, réintégration, ont eu beaucoup, beaucoup de problèmes. C'est de là qu'il y a justement ce risque que l'implication et l'encouragement des wazalendo puisse créer une situation où, tout d'un coup, on se retrouve, une fois que les hostilités prendront fin, avec un réservoir, avec beaucoup de gens en armes, dont on ne sait pas exactement quoi faire. Ça représente évidemment un risque énorme pour la population civile", explique le cofondateur de l’institut de recherche Ebuteli en RDC.

Le danger est aussi grand, car certaines parties du mouvement wazalendo se font aussi remarquer par une rhétorique très xénophobe à l’égard des Congolais tutsis ou d’expression kinyarwanda, ajoute Christoph Vogel.

Les wazalendo, une arme à double tranchant, donc, entre les mains de Kinshasa. Ceux-ci sont par ailleurs accusés de contrôler des sites situés dans des zones minières, à Rubaya par exemple, compromettant ainsi la chaîne d’approvisionnement en étain, tantale et tungstène, selon le groupe d’experts de l’Onusur la RDC.

Nafissa Amadou Journaliste au programme francophone de la Deutsche Welledw_afrique