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Les Pygmées privés de leurs ressources vitales

Henri Fotso
9 août 2019

Ce 9 août marque la Journée internationale des peuples autochtones. Ces peuples vivent dans 90 pays et représenteraient 370 millions de personnes, soit 5% de la population mondiale.

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Baka Pygmäe in Kamerun
Image : DW

Les Pygmées sont les plus célèbres des peuples autochtones d’Afrique; ils sont également les plus menacés. Du Burundi au Cameroun, en passant par les deux Congo, le Gabon, la République centrafricaine et la Guinée Equatoriale, ils restent dans l’ensemble un peuple menacé d’extinction. L’anthropologue Jean Nke Ndi en évoque les causes :

"Il y a la déforestation, la perte des forêts naturelles est une entrave énorme à la vie des pygmées qui vivent de ces forêts, notamment pour ce qui concerne leur médecine. Il y a une perte de la biodiversité. Or la pharmacopée des pygmées, c’est-à-dire leur système de soins, est basée sur la richesse de cette biodiversité. Si elle s’appauvrit, ça veut dire que c’est la qualité des soins des pygmées qui s’appauvrit aussi. Et en se dégradant, c’est le taux de morbidité, de mortalité qui augmente. Donc, les pygmées qui ne sont pas une population très nombreuse sont mis en danger."


Victimes de la modernité

En plus de la destruction de leur environnement, les Pygmées sont discriminés au niveau socialIls vivent dans l’isolement, loin des zones urbaines.  Ils n’échappent pour autant pas aux ravages de la modernité, comme le confirme le professeur Charles Binam Bikoi, directeur du Centre international de recherche et de documentation sur les langues et traditions africaines (Cerdotola) :

"La modernité, entre guillemets, est porteuse d'une civilisation de la violence, qui non seulement agresse la psychologie des peuples, mais leur confort matériel, environnemental, j’allais dire écologique, et leur historicité, leurs relations spirituelles à l’ensemble des systèmes de vie qu’ils ont mis en place depuis des millénaires."

Zentralafrikanische Republik Pygmäen der Baaka beim Tanz
Une danse de Pygmées Baaka (République centrafricaine)Image : picture-alliance/WILDLIFE/M.Harvey

Une inadéquation entre le système scolaire et leur mode de vie

Des efforts d’intégration des Pygmées sont cependant observés dans certains pays. Au Burundi par exemple, la loi stipule qu’il doit y avoir au Parlement une représentation des Pygmées, localement nommés Batwa. Ceux-ci sont élus au sein de leur propre communauté et deviennent des parlementaires, malgré un niveau de sous-scolarisation élevé. Mais le professeur Charles Binam Bikoi rappelle que l'éducation nationale est souvent mal adaptée au rythme de vie traditionnel des pygmées :

« La scolarisation est relativement en progrès. Mais elle est souvent perturbée par le conflit entre le calendrier des peuples autochtones, qui demeure rigoureusement respecté à 80-90%, et le calendrier dit national des Etats dans lesquels ces peuples évoluent. Et on va voir des enfants déserter l’école parce qu’ils doivent suivre les parents dans le calendrier lié à la chasse, à la pêche ou aux cultures tel qu’ils l’ont défini dans leur propre mode de vie

L’ONU rapporte que les peuples autochtones comptent 5.000 cultures différentes et parlent la vaste majorité des 7.000 langues de la planète. Aujourd'hui, les peuples autochtones constituent 15% des individus les plus marginalisés de la planète. Ce 9 août, Journée internationale, l'année 2019 est d’ailleurs proclamée l’année internationale des langues autochtones. La grande majorité des langues susceptibles de disparaître bientôt étant en effet parlées par ces peuples autochtones.

Henri Fotso Correspondant au Cameroun pour le programme francophone de la Deutsche Welledwfrancais