Le Tchad, allié des putschistes du Niger ?
16 août 2023Le Tchad, pays membre observateur de la Cédéaosoutient-il les autorités militaires du Niger ? Le nouveau Premier ministre nommé par les putschistes, Ali Mahamane Lamine Zeine, s'est rendu à N'Djamena, la capitale tchadienne où il a été reçu par Saleh Kebzabo, le Premier ministre tchadien, avant de rencontrer le président de la transition, le général Mahamat Idriss Déby Itno.
Cette visite, la première depuis la nomination de Lamine Zeine, suscite des interrogations malgré les explications données par le chef du gouvernement putschiste.
Coopération et amitié
Selon le Premier ministre nigérien nommé par les militaires, son déplacement au Tchad "s'inscrit dans le cadre d'une visite de coopération et d'amitié" entre les deux pays.
Ali Mahamane Lamine Zeine a affirmé, à la télévision nationale tchadienne, que N'Djamena serait disposé à soutenir le Niger et son peuple dans cette phase critique.
Les autorités tchadiennes n'ont toutefois pas confirmé ce soutien. Mais selon le ministre tchadien de la Communication et porte-parole du gouvernement de transition, Aziz Mahamat Saleh, le visiteur nigérien serait porteur d'un message secret du chef de la junte nigérienne au président de la transition tchadienne, Mahamat Idriss Déby Itno. Mais celui-ci n'a pas précisé de quel message il s'agit.
"Le premier chef d'Etat à aller à la rencontre des nouvelles autorités militaires nigériennes, c'est le président de la transition du Tchad en tant que médiateur de la Cédéao", rappelle Evariste Ngarlem Toldé, politologue et enseignant chercheur à l'université de N'Djamena.
Une visite stratégique
"Il est tout à fait normal que le Niger lui renvoie l'ascenseur. L'actuel Premier ministre du Niger était, jusqu'à sa nomination, le représentant de la Banque africaine de développement au Tchad (BAD). Il a de très bonnes relations avec les autorités tchadiennes. Ce qui fait que le choix de venir au Tchad n'est pas fortuit. En accueillant le nouveau Premier ministre, le Tchad veut être un peu neutre dans le conflit", estime encore le chercheur tchadien.
‘'Le Tchad et le Niger sont partenaires à plusieurs titresdans la lutte contre le terrorisme sur l'agenda du G5 Sahelet sur l'agenda de la Commission du bassin du lac Tchad (CBLT), à travers la force multinationale mixte. Donc c'est normal, pour le régime militaire actuel du Niger, qui se cherche et qui se retrouve dans un contexte régional relativement complexe et hostile, de revenir vers ses alliés traditionnels", renchérit Remadji Hoinathy, un autre chercheur tchadien qui avertit toutefois ne pas penser qu'il s'agisse d'un geste de soutien du Tchad envers le Niger.
"Je ne pense pas que cela puisse signifier un soutien du Tchad à la junte militaire au Niger. Le message que l'émissaire du Niger pourrait porter au président tchadien irait dans le sens de rechercher du soutien, du soutien politique et diplomatique'', pense-t-il.
Mais pour certains observateurs, le président de la transition tchadienne, qui s'est emparé du pouvoir suite au décès de son père, Idriss Deby Itno, le 20 Avril 2021, est mal placé pour mener une médiation au Niger. Son pays, soutenu par la France, aura également du mal à aider ouvertement les putschistes du Niger pensent certains observateurs.