La double nationalité en débat
15 juillet 2013En effet il existe des exceptions et parfois aussi des mesures contradictoires. Selon l'opposition sociale-démocate et verte, comme pour le partenaire de la coalition gouvernementale actuelle, le parti libéral FDP, une harmonisation, une simplification des règlements, devrait revenir sur l'agenda politique allemand après les élections législatives de septembre prochain en vue d'une reconnaissance officielle de la double nationalité.
Les "Gastarbeiter"
Jusqu'il y a quelques années encore, l'Allemagne ne se considérait pas elle-même comme un pays d'immigration. Cela bien que depuis les années 60, la République Fédérale ait attiré ceux qu'elle appelait les "Gastarbeiter", les "ouvriers invités".
En majorité des Turcs, mais aussi des Italiens ou des Yougoslaves. Les responsables politiques allemands pensaient que ces invités retourneraient un jour dans leur pays d'origine. Or la grande majorité est restée en Allemagne, leurs enfants et petits-enfants sont nés ici.
Aujourd'hui, malgré cet apport, les démographes affirment que l'Allemagne vieillit et - fait inquiétant - que les personnels qualifiés étrangers évitent l'Allemagne, lui préférant des pays plus accueillants, tels le Canada, l'Australie ou les Etats-Unis. Aussi Serkan Tören, député allemand d'origine turque du parti libéral FDP, plaide pour la double nationalité :
« Quand on est en situation de concurrence avec de tels États pour attirer les meilleurs cerveaux, on doit prendre des mesures incitatives. Ainsi dans les pays classiques d'immigration, on peut obtenir la citoyenneté après peu de temps tout en gardant même sa nationalité d'origine. Si l'Allemagne n'agit pas pour se rendre attrayante pour les personnels qualifiés, elle en subira les conséquences... »
Jusqu'à ce jour, le gouvernement fédéral refuse le principe de la double nationalité. En l'an 2000 déjà, sociaux-démocrates et Verts avaient essayé de moderniser la législation sur le code de la nationalité datant de 1913.
La réforme proposée devait permettre aux étrangers d'obtenir plus facilement la nationalité allemande. Les nouveaux Allemands auraient aussi eu le droit de garder parallèlement leur passeport d'origine. Mais la Chambre haute du Parlement, dominée par les conservateurs, avait stoppé ce projet.
Imbroglio juridique
La situation juridique en Allemagne est compliquée. Les enfants d'immigrés nés en Allemagne ont ainsi jusqu'à l'âge de 18 ans deux passeports, mais ils doivent choisir l'une des deux nationalités entre leur 18ème et au plus tard leur 23ème anniversaire. Susanne Worbs, de l'Office Fédéral pour la Migrations et les Réfugiés :
« Il arrive que les jeunes concernés aient déjà opté pour le passeport allemand, mais n'ont pas prouvé à temps qu'ils ne sont plus, par exemple, citoyens turcs et dans ce cas là ils perdent alors la nationalité allemande à leur 23ème anniversaire. Cela veut dire qu'ils sont à nouveau considérés comme des étrangers. Il doivent ainsi faire la demande d'un permis de séjour pour l'Allemagne, ils n'ont plus le droit à un séjour illimité.»
De nombreux pays interdisent à leurs citoyens d'abandonner leur citoyenneté, c'est le cas notamment du Maroc, de la Syrie ou de l'Iran.
Droit du sol ou droit du sang ?
Aujourd'hui, seuls les immigrants issus de pays de l'UE peuvent détenir deux passeports. Une autre exception : le cas de 3 millions de citoyens de l'ex-Union soviétique et d'origine allemande même lointaine, et auxquels on a délivré un passeport allemand dès leur arrivée sur le sol allemand en vertu du "jus sanguini", le droit du sang. Le droit du sang est opposé au droit du sol, en vigueur par exemple aux Etats Unis où chaque nouveau né obtient automatiquement le droit à la citoyenneté américaine. Tous les autres immigrés en Allemagne doivent choisir : soit leur nationalité d'origine, soit la nationalité allemande.