Traquer les images truquées
13 janvier 2022Nous poursuivons notre série sur les fake news, avec un focus aujourd'hui sur les images. Les fausses images ou les photos sorties de leur contexte pour illustrer autre chose que ce qu'elles montraient à l'origine… ces manipulations sont fréquentes sur internet.
D'autant que les logiciels actuels permettent à tout un chacun ou presque de modifier une image sur un ordinateur ou même un téléphone portable.
Alors pour débusquer les manipulations, il faut chercher à identifier d'où provient l'image, de quand elle date, quelle est sa source.
La recherche d'image inversée
Pour en savoir plus sur l'origine d'une image, il faut faire ce qu'on appelle une recherche inversée. Voici trois outils qui fonctionnent bien :
Google reverse image search. Cet outil de Google présente plusieurs avantages. D'abord c'est le géant américain qui a collecté le plus de données au fil des années, grâce à la performance de son moteur de recherche et à sa popularité. Google utilise également la reconnaissance faciale qui permet de retrouver des visages plus rapidement.
Google donne la possibilité de trier les images par taille. Cela s'avère pratique lorsque vous voulez zoomer sur une image pour en examiner les détails et que la version que vous avez est trop mauvaise et devient floue.
Yandex : Yandex est russe. Il donne parfois des résultats différents et parfois de meilleurs résultats que Google, en particulier lorsqu'il s'agit d'images russes.
TinEye : Le principal avantage de TinEye est qu'il vous permet de trier les résultats par date. Ainsi, avec cet outil, vous pouvez trouver quand une image a été téléchargée. TinEye ne peut pas vous dire quand elle a été partagée sur Facebook, Instagram ou les applications de messagerie pour la première fois, mais quand elle est apparue sur un site web ou sur Twitter, par exemple.
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Il existe également un outil qui combine tous les moteurs de recherche d'images pertinents et qui peut être installé en tant que plugin dans votre navigateur : le plugin InViD/WeVerify. Il offre quelques fonctionnalités supplémentaires qui sont également très utiles pour vérifier les images : une loupe par exemple, ou une analyse des métadonnées (si elles sont disponibles). Ces outils marchent aussi pour les vidéos.
Images anciennes ou contenus manipulés ?
Nous avons utilisé la recherche inversée d'images pour savoir si les images partagées par les deux camps sur le conflit Israël-Gaza en mai 2021 étaient manipulées ou anciennes. Et nous avons trouvé des exemples de manipulations d'images dans les deux camps.
D'abord une photo montrant un garçon debout entre des débris et les décombres de bâtiments détruits. Dans ce cas, l'image montre bien un enfant palestinien et la photo en tant que telle n'a pas été manipulée, cependant, l'image date du 19 octobre 2014, selon Getty Images, et non de mai 2021. Et elle a été prise dans un quartier de Gaza, alors qu'elle a été utilisée par certains médias et sur les réseaux sociaux pour illustrer les frappes aériennes en Syrie.
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Il arrive aussi que des images réelles soient manipulées à l'aide de logiciels comme Photoshop pour raconter une histoire différente. Dans ce cas, Forensically ou Foto Forensics sont des outils qui recherchent l'histoire d'une image en retraçant les modifications successives qu'elle a subies.
La fonction la plus utilisée de cet outil est l'analyse de la densité des pixels. A chaque modification, une photo perd en résolution par rapport à l'original. Une autre fonction utile est l'analyse du niveau d'erreur (ELA). L'ELA met en évidence les différences dans le taux de compression d'une image au format JPEG.
Attention aux captures d'écran
Les captures d'écran peuvent également être utilisées hors contexte ou manipulées.
Début décembre, par exemple, une capture d'écran a circulé. Elle était censée être issue d'un reportage de la Deutsche Welle qui montrait des milliers de militants anti-vaccination en Allemagne s'embrassant publiquement pour manifester contre les restrictions liées au coronavirus. En fait, la photo partagée était ancienne et avait été prise lors d'un concours de baiser au Chili… et le reportage en question n'a jamais été publié par DW - la capture d'écran était donc un faux.
Les captures d'écran ne sont donc pas une preuve suffisante de la publication de messages sur les réseaux sociaux.
Le texte d'un tweet, par exemple, peut être facilement manipulé via le code source sans avoir à utiliser de programme d'édition d'images.
Une telle manipulation n'est pas publiée sur le profil en question, mais elle est partagée sous forme de captures d'écran. Vous pouvez ajouter n'importe quelle déclaration possible à n'importe quel compte. Et le mensonge a l'air terriblement vrai.
Les meilleurs outils aussi ont des défauts
Enfin, gardez à l'esprit qu'aucun outil n'est parfait. Il est donc fortement recommandé de toujours effectuer plusieurs recherches avec des outils différents, puis de comparer les résultats.
Si vous avez des doutes sur une image particulière, utilisez les outils de vérification d'image et tentez de reconstituer son histoire. Si une image vous semble trop belle pour être vraie, vous avez probablement raison de vous méfier. Usez de vos capacités de doute et évitez de partager une image jusqu'à ce qu'elle puisse être vérifiée. Sinon, votre nom s'ajoutera à la longue liste des personnes victimes de contenus manipulés.