En Guinée, l'opposition vent debout contre le double scrutin
16 mars 2020Le président Alpha Condé a pris un décret vendredi (13.02) convoquant les élections législatives et le référendum constitutionnel pour dimanche prochain (22.03). Malgré cette énième prorogation, il n’est pas question pour l’opposition de cautionner le double scrutin.
La majeure partie de l’opposition qui ne participe pas au vote continue de dénoncer le processus électoral actuel en Guinée. Le front national de défense de la constitution (FNDC) critique le fichier électoral duquel il faut extirper plus de deux millions d’électeurs, selon la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao).
Un processus électoral critiqué
"Le fichier n’est pas correct pour organiser des élections", conclut Oury Bah, président du parti Union pour la démocratie et le développement (UDD), membre du FNDC qui prête au président Alpha Condé les intentions de faire un troisième mandat. M. Bah estime que le pouvoir ne doit pas organiser ce double scrutin:
"Ils se verront dans une situation où ces élections ne seront ni reconnues par une majorité de la population guinéenne, ni par la communauté régionale et par conséquent par la communauté internationale."
Les Guinéens auront recours aux formes constitutionnelles et légales pour ne pas tomber "dans une autre forme d’oppression qui annihilera toute possibilité d’alternance démocratique", prévoit Oury Bah.
Si M. Bah reste ambigu sur ce que va faire l’opposition dimanche, le député UFDG et membre du FNDC Ousmane Diallo, affirme que le double scrutin n’aura pas lieu le 22 mars sur toute l’étendue du territoire :
"Il se tiendra dans une seule partie de la Guinée, il ne se tiendra pas dans les deux tiers. Nous travaillons actuellement pour qu’il ne se tienne pas dans les zones dont nous avons le contrôle."
Une solution de sortie de crise
Mardi (17.03), une délégation de chefs d’Etat va rencontrer le président Alpha Condé. Une source gouvernementale guinéenne confirme l’arrivée des présidents nigérians et ivoiriens Muhamadu Buhari et Alassane Ouattara. Le motif de leur arrivée reste officiellement inconnu. En février dernier, une visite de chefs d’Etat de la Cédéao avait été annulée.
Le député Ousmane Diallo indique que l’arrivée mardi des dirigeants de la Cédéao "reste des démarches entre chefs d’Etat, cela ne nous concerne pas".
Oury Bah souhaite, pour sa part, que cette délégation des chefs d’Etat de la Cédéao ait un message clair en direction de leur homologue Alpha Condé :
"Qu’ils disent à monsieur Alpha Condé : votre changement de Constitution, mettez-ça de côté ! Par rapport au processus électoral, ce n’est pas du jour au lendemain qu’on peut refaire un fichier électoral, ça va prendre du temps."
Oury Bah espère en effet que la venue des dirigeants de la Cédéao puisse faire bouger les lignes, notamment sur un point crucial : la Constitution d’un nouveau fichier électoral.
Il en espère aussi la mise en place d’une feuille de route pour une sortie de crise durable dont on voit mal l’issue pour l’instant, à moins d’une semaine d’un double scrutin controversé et de tous les dangers.
Depuis octobre dernier, cette crise préélectorale a entraîné la mort d’une trentaine de civils.