Début du procès des assassins de Thomas Sankara
11 octobre 2021En tout, 14 des principaux accusés feront face aux juges et sont poursuivis pour "complicité d’assassinats", "recel de cadavres", "attentat à la sûreté de l’État".
Au sein de l’opinion publique, certains souhaitent la manifestation de la vérité dans l’assassinat de Thomas Sankara et de ses compagnons, tout en évoquant déjà une clémence des juges militaires dans la perspective d’une réconciliation nationale.
"Les attentes sont grandes, mais espérons que cette montagne judiciaire ne va pas accoucher d’une petite souris", estime cet habitant Ouagadougou. Pour un autre Ouagalais, le procès doit aussi contribuer à la paix : "Même s’ils sont reconnus coupables, qu’on essaie au moins d’alléger leur peine et si possible pardonner certains en fonction de leur implication".
Blaise Compaoré, absent
Ce procès s'ouvre sans la présence physique de l’ancien président Blaise Compaoré, considéré comme le principal responsable de cet assassinat. Blaise Compaoré était d'abord un ancien compagnon de Thomas Sankara et vit en exil depuis sept ans en Côte d’Ivoire. Ses avocats ont évoqué par écrit un "procès politique" devant une "juridiction d’exception". Une absence qui pourrait être un obstacle à la réconciliation nationale et au pardon de l’avis du vice-président de la Nouvelle Alliance du Faso (NAFA), Aziz Dabo.
Selon lui, "cette absence montre déjà que, avec le processus de réconciliation qui est enclenché, sous le leadership du président Roch Marc Christian Kaboré, il n’y prendra peut-être pas part. L’histoire est expliquée, racontée, par certains acteurs qui n’ont pas forcement joué des rôles majeurs (sous la révolution NDLR). La présence du président Compaoré aurait pu apporter certains éclaircissements par rapport à un certain nombre de choses racontées çà et là".
Pas de retransmission en direct
Il n’y a pas que l’absence de Blaise Compaoré qui frustre les populations. Des organisations de la société civile exigent une retransmission en direct du procès à la radio et à la télévision à l’image des jugements des tribunaux populaires de la révolution sous Thomas Sankara. La justice militaire est contre cette option. Le porte-parole du Balai Citoyen Kinda Éric Ismaël reste tout de même optimiste.
Il estime que "la demande de retransmission en direct n’est pas seulement adressée à la justice militaire. Elle est aussi adressée au procureur, même à l’autorité politique et nous osons d’ici-là espérer qu’une décision politique va sortir admettant ou autorisant la retransmission en direct du procès à la télévision et à la radio."
Assassiné alors qu’il n’avait que 37 ans, Thomas Sankara avait entamé une campagne contre l’impérialisme. Il avait réussi en quatre ans de règne à impulser une dynamique à la gouvernance de la Haute-Volta devenue sous la révolution le Burkina Faso, "pays des hommes intègres".
Ce procès, tant attendu par les familles des victimes du putsch de 1987 qui a porté au pouvoir Blaise Compaoré, s'est ouvert sous haute surveillance des forces de défense et de sécurité dans un pays en proie à la violence djihadiste depuis 2015.