Des lendemains qui pleurent
20 avril 2011Musango a 10 ans au début du roman. Elle souffre d'une maladie du sang. Son père vient de mourir, victime d'un braquage. La mère de Musango se retrouve complètement démunie. C'est alors qu'une voyante la persuade que sa fille est possédée par un démon et qu'elle est la cause de tous ses problèmes. Chassée de chez elle, la petite fille va connaître toutes sortes d'aventures. Elle est d'abord recueillie par une association qui s'occupe des enfants des rues, puis elle est enlevée et vendue à un réseau de malfaiteurs. Pendant deux ans, elle leur sert de domestique dans une maison perdue au fond de la brousse, où sont cachées des femmes qui vont partir pour l'Europe pour s'y prostituer. Puis Musango parvient à s'enfuir et se réfugie chez son ancienne directrice d'école, qui la prend sous son aile. Elle part alors à la recherche de sa mère.
Critique sociale au ton dénonciateur
L'histoire se déroule dans un pays imaginaire, le Mboasu, qui sort tout juste d'une guerre civile. La population y est apathique, les gens ne croient plus en rien et surtout pas à un lendemain meilleur, ou même à un lendemain tout court. L'auteur évoque les rapports difficiles entre hommes et femmes, entre parents et enfants. Elle dénonce la traite des femmes, les superstitions, mais surtout les cultes d'éveil, des églises qui tirent profit du désespoir des gens pour s'enrichir sur leur dos. L'une de ces églises est d'ailleurs dirigée par ces mêmes malfaiteurs à la tête d'un réseau de prostitution, qui se font passer pour des hommes de Dieu. Et quand Musango tente de les dénoncer auprès de la police, on lui fait comprendre qu'elle ferait mieux d'oublier toute cette affaire, car il s'agit-là de personnes très influentes…
L'auteur du roman
Leonora Miano est Camerounaise. Elle est originaire de Douala, mais elle est installée en France depuis une vingtaine d'années. Il s'agit de son deuxième roman, publié en 2006. Elle en a écrit trois autres depuis, ainsi que des nouvelles et de nombreux textes de chansons.
Un livre émouvant
Le style de Léonora Miano est à la fois poétique, drôle et percutant. L'histoire de la petite Musango est poignante. Tout au long du livre, elle s'adresse à sa mère. Une mère qui l'a rejetée, battue, qui n'a pas su l'aimer parce qu'elle ne s'aimait pas elle-même. Une femme qui reste pourtant sa mère. Finalement Musango est capable de la comprendre et de lui pardonner. Mais au-delà de l'intrigue, on est frappé par la métaphore qui traverse le roman du début à la fin. Parce que la mère de Musango, c'est l'Afrique. Une Afrique qui a perdu ses repères, qui rejette son passé, qui se noie dans les tourbillons du présent et qui n'arrive pas à se projeter dans l'avenir. Et ce n'est pas un hasard si le nom de l'héroïne, Musango, signifie paix en langue douala. Car la petite fille représente l'espoir et les générations futures.
Auteur : Aude Gensbittel
Edition : Marie-Ange Pioerron