Affaire Cum-Ex : Olaf Scholz bientôt entendu comme témoin
10 août 2022Il n'y a pas que l'ancien chancelier allemand Gerhard Schröder qui s'attire des critiques - à cause de sa proximité avec les autorités russes. Olaf Scholz, le chancelier actuel, est lui aussi éclaboussé par une tout autre affaire, qui a des airs de thriller financier.
Il s'agit du scandale dit de "Cum-Ex", dans lequel il est question d'actions de banques et d'actionnaires qui auraient tenté d'échapper au fisc.
La figure principale de cette affaire est un ancien député du SPD, Johannes Kahrs, de Hambourg. Or Olaf Scholz, le chancelier actuel, est aussi membre du SPD et a été durant des années le maire de cette ville. Que savait-il de ces sombres affaires? C'est ce que doit déterminer la justice.
200.000 euros dans un coffre-fort
Imaginez plus de 200.000 euros en petites coupures enfermés dans un coffre de banque. C'est ce que des enquêteurs du Parquet de Cologne ont découvert dans une filiale de la banque Warburg. Or ce coffre, il appartenait à Johannes Kahrs, ancienne figure du parti social-démocrate et ancien député de Hambourg. L'élu a dû renoncer en 2020 à son mandat pour favoritisme.
Les enquêtes portent sur des transactions illégales de la banque Warburg pour contourner le fisc. Johannes Kahrs est soupçonné d'avoir intercédé auprès des autorités pour éviter à l'établissement de payer ses arriérés d'impôts... en échange d'une commission.
Pourquoi l'appellation "Cum-Ex" ?
L'expression "Cum-Ex" vient du latin. Normalement, les entreprises distribuent des dividendes à leurs actionnaires une fois par an. Ceux-ci doivent alors payer un impôt d'environ 25 % sur cette somme. Mais les participants à l'opération "Cum-Ex" - les banques et certains actionnaires - ont fait circuler les actions très rapidement en l'espace de très peu de temps, c'est-à-dire que ces actions ont souvent changé de propriétaire, de facon à se faire rembourser une partie de l'impôt qui s'y rapporte. Cette fraude raffinée a déboussolé les autorités fiscales. Certains montants ont même été remboursés plusieurs fois par l'Etat.
Pour bien comprendre cette manipulation, voici une image donnée par l'ancien député de gauche Fabio de Masi qui compare la combine au fait de déposer une bouteille consignée au supermarché, de photocopier ensuite le ticket de consigne et de l'encaisser plusieurs fois à la caisse du supermarché. Ce qui est illégal.
Olaf Scholz a rencontré des dirigeants de Warburg
Plusieurs enquêtes ont actuellement cours au niveau fédéral, plusieurs banques sont soupçonnées d'avoir eu recours à ces manipulations. Mais si la banque Warburg retient l'attention, c'est qu'Olaf Scholz, alors maire de Hambourg, a rencontré en 2016 les associés de la banque. A ce moment-là, les directeurs de l'établissement financier faisaient déjà l'objet d'une enquête.
Peu après, la ville de Hambourg a renoncé à réclamer 47 millions d'euros d'arriérés fiscaux à la banque.
Un an plus tard, le ministre fédéral des Finances de l'époque, Wolfgang Schäuble (CDU), a ordonné, au contraire, à la ville de Hambourg de réclamer 43 millions d'euros supplémentaires à la banque Warburg.
Le chancelier ne se souvient pas
Le chancelier Olaf Scholz dit ne pas se souvenir des détails de son entrevue avec les dirigeants de la banque Warburg. Et qu'il n'était pas au courant de la présence de plus de 200 000 euros dans le coffre-fort de Johannes Kahrs.
Le parquet compétent n'a d'ailleurs pas non plus établi si ces billets étaient liés aux transactions "Cum-Ex".
Olaf Scholz sera entendu le 19 août comme témoin par la commission d'enquête du Parlement régional de Hambourg. Les enquêteurs auraient réclamé l'accès aux e-mails du chancelier, ce que n'a pas confirmé son porte-parole.