Coopération au Sahel : une idée d'Amadou Toumani Touré
16 décembre 2019Les témoins parlent de plusieurs centaines de personnes pour accueillir "ATT" à l'aéroport et à son domicile malien dimanche (15.12.19). L'ancien président Amadou Toumani Touré est donc rentré au Mali après sept ans d'exil au Sénégal. Il avait été chassé du pouvoir par un coup d'Etat en 2012. Un retour dans un contexte politique compliqué au Mali, et alors que la situation sécuritaire dans le Sahel ne cesse de se dégrader.
Ce retour d'ATT intervient au moment même où les chefs d'Etat de la sous-région redisent leur volonté de coopérer. Il a effectivement coïncidé avec un sommet extraordinaire du G5 Sahel à Niamey. Un sommet cinq jours après l'attaque djihadiste d'Inates au Niger qui a coûté la vie à 71 soldats nigériens et en marge duquel le secrétaire permanent du G5 Sahel (Mali, Burkina Faso, Tchad, Mauritanie et Niger) Maman Sambo Sidikou a redit la volonté de tous de coopérer contre le terrorisme.
Problèmes d'argent
Une volonté pas nouvelle qui rappelle justement celle affichée par Amadou Toumani Touré pendant ses années à la tête du Mali entre 2002 et 2012. "C'est vrai que l'ancien président avait soutenu la mise en place de cette force conjointe", détaille l'analyste politique malien Mousa Sidibé. "Mais cela n'a pas marché déjà à cause d'obstacles liés au financement. Les Etats ont sollicité les puissances étrangères, en sachant pourtant que les premiers concernés sont d'abord les Etats, qui n'étaient pas à la hauteur".
Ces problèmes de financement du G5 Sahel ne sont toujours pas réglés aujourd'hui. Ce qui affaiblit évidemment l'efficacité de l'organisation. Même si 4500 soldats, français essentiellement, de l'opération Barkhane et ceux de l'ONU via la Minusma au Mali, interviennent en parallèle. Et puis malgré la volonté affichée des différents Etats encore ce week-end, le savoir-faire opérationnel n'est toujours pas satisfaisant non plus.
Les soldats ne sont pas assez formés et il faut faire plus. C'est en tous cas ce que plaident certains comme Boubacar Salif Traoré, directeur d'Afriglob Conseil, entreprise malienne spécialisée dans les questions de sécurité et de développement. "Les forces internationales tentent de déployer des missions, mais il y une limite à respecter, elles ne peuvent pas se mêler de tout, au risque de se voir accuser d'ingérence", dit-il.
"Il faut donc à l'intérieur des Etats l'émergence de compétences locales capables de mettre en route ce qui est défini par ces chefs d'Etats. Il n'y a pas ce savoir-faire capable de mettre en route de ce qui a été défini".
Plus de soldats dans la zone des trois frontières
Certains pointent aussi du doigt des problèmes qui ne devraient plus arriver à l'heure où les terroristes gagnent toujours plus de terrain. "Comment peut-on avoir des dysfonctionnements aujourd'hui à tel point que le Burkina Faso reproche publiquement à l'armée malienne d'intervenir chez elle malgré l'existence du G5 Sahel ?", s'interrogeait un de nos interlocuteurs pendant la préparation de cet article. Des dysfonctionnements reconnus à demi-mot par le président burkinabé Roch March Chrisitan Kaboré dimanche à Niamey.
Pour y remédier le G5 Sahel devrait prochainement mobiliser plus de soldats dans la zone dite des trois frontières entre le Burkina Faso, le Mali et Niger. L'idée est évidemment d'arriver à une vraie et effective collaboration que l'ancien président malien Amadou Toumani Touré ne manquera pas d'observer depuis son domicile. Lui qui est cette fois définitivement rentré au Mali !