Un clavier pour promouvoir les langues du Bénin
13 juillet 2021En dehors des langues officielles de travail, chaque pays africain dispose de ses langues nationales. Au Bénin, on en compte près d'une soixantaine parmi lesquelles le fongbé, le mina, le yorouba, le goungbé, le bariba ou encore le aïzo.
Mais la pratique de ces différentes langues au-delà des besoins du quotidien est souvent difficile, parce que très peu de Béninois ont l'occasion de les écrire ou de les lire. C'est ce qui a poussé Bill Yoclounon, un jeune journaliste passionné de la langue fongbé à créer une application ''clavier fongbé''. Il ambitionne d'aider ses compatriotes à s'approprier leur langue et en maîtriser l'écriture.
Le clavier qui fait vivre les langues
"Moi j'ai rencontré un problème. En 2018, quand je créais du contenu, j'écrivais du ''fongbé'' faux, c'était du ''fongbé'' francisé parce que je n'avais pas tous les caractères, toutes les diacritiques, toutes les lettres spécifiques à l'alphabet ''fongbé'' sur les claviers google ou les claviers des grandes firmes comme Microsoft-Key", explique Bill Yoclounon.
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La quête d'une solution à un problème personnel a conduit le jeune Béninois à mettre au point un outil numérique très pratique. A 25 ans, il développe ainsi le clavier fongbé, fongbé étant la langue vernaculaire parlée par plus de 35% des Béninois.
"Mais entretemps j'ai voyagé, je suis parti en France. Ce qui a fait qu'on n'a pas lancé ce clavier. Je me suis dit à un moment, pourquoi lancer uniquement le clavier fongbé alors qu'il y a d'autres langues béninoises ? Et toutes les langues béninoises d'ailleurs sont confrontées au même problème d'indisponibilité de clavier. On a donc recommencé le travail et maintenant on a pris non seulement en compte le fongbé mais toutes les 56 langues locales qui sont parlées au Bénin", explique fièrement Bill Yoclounon.
Au-delà du fongbé
Le jeune Béninois et son équipe ne se sont pas non plus limités aux langues nationales béninoises.
"On a pris en compte aussi d'autres langues africaines, comme le wolof, le dendi qui est aussi parlé au Niger, le haoussa, le zerma, le yorouba qui est très parlé au Nigeria et plusieurs langues africaines", explique-t-il.
Faraj Ali Yarou est journaliste animateur et traducteur, il exploite au quotidien ce clavier qu'il a téléchargé sur Play Store pour réussir ses traductions et pouvoir écrire avec justesse dans les langues locales qu'il utilise. Comme lui, plus de 10.000 autres Béninois ont déjà essayé cet outil.
"Avec ce clavier, j'ai pu livrer beaucoup de commandes de traduction, ça m'a fait gagner beaucoup d'argent. C'est en 2019 que je l'ai découvert, j'ai eu beaucoup de marchés de traduction sur la Covid-19 par exemple. J'ai traduit des contes, des poèmes...j'ai traduit beaucoup de textes. C'est vraiment génial, je trouve que le 'petit', il est vraiment révolutionnaire".
Sur les réseaux sociaux et d'autres supports, Bill Yoclounon crée des contenus pour permettre à chacun de maîtriser les contours des langues, il est fier de contribuer ainsi à l'alphabétisation.
"C'est une première victoire", se réjouit Bill Yoclounon qui annonce déjà la suite : "On ne va pas s'arrêter là, parce que l'idée plus grande c'est d'aller dans les écoles, à la base. Si on a raté les adultes, les personnes âgées, on ne doit pas rater les enfants parce que ce sont eux l'avenir".
L'avenir des langues nationales africaines pourrait ainsi être renforcé par ce genre d'outil numérique.