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En Centrafrique, la chasse à la fraude dans l’administration

Jean-Fernand Koena
21 juillet 2022

En tentant d'identifier les fonctionnaires fraudeurs qui touchent indument plusieurs salaires, le gouvernement espère faire d'importantes économies.

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L'entrée d'un tribunal de bangui, surveillé par des gardes
Le FMI appelle Bangui a faire des économiesImage : Jerome Delay/AP Images/AP Photo/picture alliance

En proie à un déficit de trésorerie exacerbé par l'insécurité et le gel des appuis budgétaires du FMI et de la Banque Mondiale, la Centrafrique lance une opération de vérification dans l'administration publique. 

Il s'agit d'identifier les fonctionnaires qui perçoivent indument plusieurs salaires. Le gouvernement espère ainsi faire plus d'1,2 milliard d'économie par an. 

Mais cette opération est délicate, notamment lors du contrôle des forces de défense et de sécurité.  

Agents fictifs 

Tout serait parti d'un constat selon lequel, des agents de l'Etat auraient développé des stratégies frauduleuses qui leur procureraient deux ou trois salaires selon le cas. 

Marcel Djimassé, le ministre centrafricain de la Fonction publique s'en explique :  

"Le contrôle physique a deux objectifs. Le premier c'est de vérifier que les agents qui figurent dans le fichier sont réels. Que ce ne sont pas des agents fictifs. Deuxièmement nous profitons pour régler le problème de double salaire." 

Dans le viseur du gouvernement se trouve un réseau de fraudeurs à tous les niveaux de l'administration publique. Ceux-ci qui inventent des arguments, voire développent des manœuvres de tricherie sur l'âge qui retardent parfois le départ à la retraite des agents.  

Le rôle de la Russie 

Dans un centre d'enrôlement à Bangui, les fonctionnaires, munis de leurs documents se présentent ainsi à tour de rôle. Les experts et officiers de contrôle doivent procéder à une reconnaissance faciale et une authentification de l'empreinte digitale sur la carte d'identité. 

Ecoutez le reportage de notre correspondant à Bangui...

Boniface n'est pas inquiet après avoir passé avec succès le contrôle. 

"Je ne me sens pas inquiet, car j'ai toutes les pièces. Je suis fonctionnaire, je devrais avoir les documents administratifs. J'encourage ce contrôle parce que moi j'ai un seul numéro de matricule." 

Ce contrôle n'est pas nouveau. Mais certains s'interrogent sur l'exploitation réelle des résultats. 

Car en 2008 par exemple, l'audit effectué au ministère de la Défense a été classé sans suite. Autre question qui intrigue : le rôle que pourraient jouer les partenaires russes du gouvernement. 

Pression des bailleurs internationaux 

Les autorités n'écartent pas l'idée de confier le contrôle à des experts russes. Des observateurs critiquent une démarche solitaire et souhaitent un élargissement aux services des statistiques. 

D'autres demandent aux autorités de s'attaquer au nœud de la fraude à partir du trésor et de l'office de l'informatique.  

Parallèlement, la pression du FMI s'intensifie. Le gouvernement est appelé à réduire son budget prévisionnel de 289 milliards. Oral Williams est l’envoyé spécial du FMI : 

"Compte tenu du contexte difficile - le pays a subi une crise sanitaire et maintenant le pays est confronté à la hausse des prix des denrées alimentaires et au-delà le prix des produits pétroliers. En même temps, il cherche des financements concessionnels. L'objet de la mission c'est de vraiment réviser le projet de budget de 2022."

Le gouvernement espère mettre à profit son audit. La phase pilote de l'opération permet d'évaluer l'ampleur du phénomène des salaires fictifs. Les fraudeurs encourent des poursuites judiciaires.