Que cache la nervosité d’Ibrahim Traoré au Burkina ?
18 juillet 2024Le capitaine Ibrahim Traoré accuse ces deux Etats de vouloir déstabiliser son pays avec le soutien de forces étrangères. Le dernier évènement en date est la décision desEtats-Unis de redéployer en Côte d’Ivoire leurs forces qui étaient auparavant présentes au Niger.
Le choix de la Côte d’Ivoire pour une nouvelle base américaine est mal vécu par le chef de la junte burkinabé qui y voit un moyen de déstabilisation de son pays.
Mais ce n’est pas l’avis de David Zoumenou, spécialiste des relations internationales et chercheur principal à l'Institut d'études de sécurité (ISS), basé à Pretoria. Il parle notamment d'un régime militaire paranoïaque.
"Je pense que cela traduit l'idée ou l'esprit paranoïaque du régime au Burkina Faso. Un régime qui a peur des réactions, qui a peur tous les développements qui ont lieu dans la région, les circonstances, vu les conditions dans lesquelles le régime est arrivé au pouvoir", a-t-il expliqué.
Un moyen de diversion
Pour certains analystes, le choix de la Côte d’Ivoire serait motivé par sa position stratégique au cœur de l’Afrique de l’Ouest, pour mieux surveiller les mouvements des groupes djihadistes dans le Sahel.
Même s’il ne met pas en doute les raisons évoquées par le chef de la junte burkinabè, l’analyste politique Magloire Keumayou, se demande, pour sa part, pourquoi, si Ibrahim Traoré a les moyens de s’informer sur les intentions de ses voisins, n’emploie-t-il pas ces mêmes moyens pour contenir les groupes djihadistes qui attaquent son pays ?
"Ce qui est certain, c'est que c'est une attitude qui n'aide pas à conjuguer les forces. Et cette conjugaison des forces, encore une fois, elle est indispensable pour arriver à éradiquer le terrorisme. S’il est bien renseigné sur les menaces portées par les partenaires ou ex-partenaires, cela signifie qu'il pourrait avoir des renseignements également sur les adversaires du pays et de sa stabilité que sont les terroristes", s’interroge l’analyste.
Vive tension dans la région
La tension est de plus en plus vive dans la région et les dernières tentatives de médiation ne donnent pas encore de résultats. Mais David Zoumenou estime qu’il n’est pas encore trop tard.
"Deux choses. La première, c'est que la médiation est un processus, parce qu'il y a des paramètres qu'il faut mettre en place. D'abord créer la confiance et une fois que la confiance est créée, on peut amorcer des sujets qui fâchent et trouver des compromis. Deuxième élément, c'est l'intervention des anciens présidents et l'intervention du président angolais. Ce qu'il faut éviter, c'est la multiplicité des acteurs et des initiatives pour ne pas disperser les énergies. Il est nécessaire, pour que la médiation puisse aboutir, de mutualiser les efforts."
Le Burkina Faso, le Niger et le Mali, trois pays dirigés par des régimes militaires et ciblés par des groupes djihadistes, se sont retirés de la Cédéao pour former une confédération baptisée Alliance des Etats du Sahel (AES).