Brésil : le retour de l'insubmersible Lula
31 octobre 2022Vainqueur de l'élection présidentielle au Brésil avec 50,9% des suffrages exprimés en sa faveur - contre 49,1% à son adversaire, le président sortant Jair Bolsonaro - Luiz Inácio Lula da Silva, tout simplement connu sous le nom de Lula, revient de loin, très loin.
Rien ne prédisposait Lula à un tel destin, ce cadet d'une fratrie de huit enfants, né le 27 octobre 1945 dans une famille d'agriculteurs pauvres du Pernambouc, dans le nord-est du pays. Enfant, Lula était cireur de chaussures. Il a sept ans lorsque sa famille déménage à Sao Paulo pour échapper à la misère.
Vendeur ambulant puis ouvrier métallurgiste à 14 ans, il perd l'auriculaire gauche dans un accident du travail. A 21 ans, il entre au syndicat des métallurgistes et conduit les grandes grèves de la fin des années 1970, en pleine dictature militaire (1964-1985).
L'ascension, puis la chute
Cofondateur du Parti des travailleurs (PT) au début des années 1980, il se présente pour la première fois à l'élection présidentielle en 1989 et échoue de peu. Après deux nouveaux échecs, en 1994 et en 1998, la quatrième tentative sera la bonne, en octobre 2002. Il est réélu en 2006.
Premier chef de l'Etat brésilien issu de la classe ouvrière, il a mis en œuvre d'ambitieux programmes sociaux, grâce aux années de croissance portées par le boom des matières premières. Sous ses deux mandats, près de 30 millions de Brésiliens sont sortis de la misère.
Après avoir quitté le pouvoir sur un taux stratosphérique d'opinions favorables (87%), le ciel s'est assombri pour Lula. Condamné pour corruption dans le plus grand scandale de l'histoire du Brésil, "Lavage express", Lula a été incarcéré 580 jours, d'avril 2018 à novembre 2019.
Le chef de file du PT s'est toujours dit victime d'un complot politique qui a permis à Jair Bolsonaro d'être élu à la présidence en 2018 alors qu'il en était le grand favori. Aujourd'hui, 12 ans après avoir quitté le palais de Brasilia, l'inoxydable Lula veut rendre "le Brésil heureux de nouveau".
L'objectif premier de Lula sera de réconcilier le pays. S'il reste perçu comme "près du peuple" et est toujours très aimé, surtout dans les régions pauvres du Nord-Est, son fief historique, il est aussi détesté par une partie des Brésiliens pour lesquels il incarne à tout jamais la corruption.
Jair Bolsonaro, qui avait beaucoup joué sur la haine du PT pour être élu en 2018, n'a cessé de le traiter de "voleur" et d'"ex-prisonnier" lors de leurs débats.
Mettre fin à la faim
En guise de première déclaration post-victoire, Lula a assuré que le Brésil était "de retour, que le Brésil est trop grand pour être relégué à ce triste rôle de paria du monde".
L'enfant du Pernambouc a assuré que l'un des premiers engagements de son gouvernement serait de "mettre fin à la faim". Troisième producteur mondial d'aliments et le premier en protéines animales, le Brésil a la technologie et une immensité de terres arables "de garantir que chaque Brésilien puisse prendre un petit-déjeuner, un déjeuner et un dîner tous les jours".
Une promesse que Lula essaiera de mettre à exécution dès le 1er janvier 2023, date de son retour au palais de Brasilia.