Berlin fait-il assez pour la Corne de l'Afrique ?
29 juillet 2011Au début du mois de juillet, la chancelière allemande Angela Merkel était en visite sur le continent africain et notamment au Kenya, l'un des pays de la Corne de l'Afrique qui fait en ce moment la Une des journaux avec la Somalie, l'Ethiopie, Djibouti, le Soudan et l'Ouganda pour une tout autre raison : la famine. A l'époque, Angel Merkel qui était accompagnée d'une importante délégation économique, a préféré ne pas la voir et s'est concentrée sur l'image plus positive d'un Kenya dynamique et florissant. A Nairobi, elle n'a débloqué qu'un million d'euros d'aide.
Quelques reportages dramatiques plus tard, le gouvernement a certes augmenté l'aide d'urgence qui atteint désormais 30 millions d'euros. Berlin finance, en outre, 20 % des quelque 160 millions d'euros débloqués par l'Union européenne. Il n'en reste pas moins que la contribution allemande reste bien maigre à côté de la somme de 1,1 milliard d'euros dont Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations Unies, estime avoir besoin rien que pour la Somalie. Elle est aussi moins importante que celle de ses voisins européens comme la France ou la Grande-Bretagne. Markus Löning, délégué du gouvernement pour l'aide humanitaire, s'en explique :
« En ce moment, si l'aide n'arrive pas suffisamment rapidement ce n'est pas par manque de moyens financiers. A l'issue de la conférence de la FAO, l'Allemagne a doublé son aide, l'Union européenne aussi, la Banque mondiale a donné beaucoup plus d'argent et ce n'est pas la seule. Je pense que ce n'est pas le moment de tomber dans des querelles politiques. Il faut plutôt se concentrer sur l'acheminement de cette aide sur place. »
Pour Markus Löning ce n'est donc pas tant les finances qui posent problème que l'ampleur de la catastrophe qui a surpris tout le monde. Le délégué du gouvernement oublie certes un peu vite qu'une organisation comme Oxfam ou même Ban Ki-moon, le secrétaire général des Nations Unies, pourtant souvent critiqué pour sa discrétion, ont tiré la sonnette d'alarme il y a plusieurs mois déjà. Mais même en admettant que l'étendue et la gravité de la famine dans la Corne de l'Afrique n'aient pas été prévisibles, la région et de facto la communauté internationale n'en sont malheureusement pas à leur première crise alimentaire. Pour Jochen Hippler, politologue, le problème se trouve ailleurs :
« Nous avons clairement perdu du temps, disons depuis environ l'automne dernier. Durant tous ces mois, nous aurions dû faire quelque chose, au moins de manière préventive. Et ce n'est pas la première fois que l'aide est débloquée trop tard, une fois que des dizaines de millions de personnes sont déjà décédées. C'est un point essentiel. Il faut absolument se pencher sur les causes de ces catastrophes. Toutes les causes. Car ce n'est pas seulement le changement climatique - même s'il joue un rôle important. Ce n'est pas seulement l'incapacité de certains Etats sur place. C'est aussi parce que la communauté internationale se réveille trop tard et ne prend la situation au sérieux qu'une fois que le nombre de morts a dépassé les cinq chiffres. Q'une fois que l'opinion publique de chaque pays donnateur a suffisamment été sensibilisée. Là, tout d'un coup, l'aide se met en marche. Mais il est déjà trop tard. »
La sécheresse et la famine qui sévissent actuellement dans la Corne de l'Afrique ont déjà fait des dizaines de milliers de morts et menacent 12 millions de personnes.
Auteur : Konstanze Von Kotze
Edition : Sébastien Martineau