Bénin : S.O.S en faveur de la forêt sacrée de Ouidah
25 août 2021Conservée depuis plusieurs siècles, la forêt sacrée de la ville historique de Ouidah est avant tout un sanctuaire de la biodiversité avec une multitude d’espèces végétales rares mais aussi animales, telles que des écureuils et des céphalophes.
Rémi Sèglonou est guide de musée et de mémoire, il connaît bien l'intérêt écologique de ce site:
"Cette forêt est au milieu d'une ville et je pense que ça doit être la première du genre dans tout le Bénin. Donc, par rapport à la diversité de l'écosystème, ça joue un grand rôle."
(Re)lire aussi → Le Mur du patrimoine, une nouvelle perle culturelle au Bénin
Pression urbaine
Mais depuis des décennies, la forêt n’a cessé de reculer devant la pression urbaine et aussi à cause des riverains qui viennent y exploiter le bois et détériorent la faune et la flore.
Face à ces périls, Judicaël Kpassènon, un jeune natif de Ouidah, a décidé de lutter pour sauvegarder ce qui reste de cette forêt.
(Re)lire aussi → Bénin : retour des biens culturels, et après ?
"Effectivement, la forêt aujourd'hui est menacée parce que dans le passé, c'était une forêt qui avait une superficie de 20 hectares. Mais aujourd'hui, nous ne sommes plus qu’à 3,5 hectares. Elle a été réduite à cause de l'action des hommes", déplore Judicaël Kpassènon.
Ce descendant de la famille royale Kpassè a donc créé une association pour lutter contre le recul de la forêt et l'érosion du caractère sacré de cette dernière.
Il organise des campagnes de sensibilisation dans la ville, communique sur ce sujet sur les réseaux sociaux et organise des contrôles tout autour de la forêt.
"Mais nos actions ne suffisent pas parce qu'on a peur qu'un jour la forêt disparaisse, confie-t-il. Nous voulons que les autorités nous viennent en aide pour que nous puissions ensemble sauver cette forêt parce qu'elle n'est pas seulement cultuelle mais elle est aussi touristique."
Une forêt riche en histoire
Dans l'histoire de cette ville, cette forêt revêt en effet une importance capitale. Elle tire sa sacralisation, selon la légende, d'un épisode mystérieux de la vie du roi Kpassè, fondateur du royaume de Ouidah qui y menait ses prières et ses activités de commerce d’esclaves.
Celui-ci, fuyant les envahisseurs, se serait réincarné dans un iroko devenu un arbre magnifique au cœur de la forêt.
Ce sont aussi ces légendes qui ont séduit Régine Lappo, une Française qui s’est installée y a 25 ans dans cette localité:
"C'est une forêt qui est très riche historiquement et cultuellement, déjà c'est un lieu qui est fort agréable pour se promener, se resourcer... Il y a toute la symbolique de la forêt qui est importante, avec l'Iroko sacré, avec l'esprit du roi Kpassè qui est là. Il faut que les gens connaissent déjà cette histoire et se battent pour qu'elle perdure, que le lieu perdure et soit mis en valeur."
Avec les nombreux projets touristiques et de réhabilitation de la ville de Ouidah, cet appel au sauvetage de la forêt pourrait être entendu par les autorités locales.
Ce patrimoine naturel à caractère culturel a officiellement été ouvert au public en 1992 à l’initiative de l’ancien président béninois, Nicéphore Dieudonné Soglo, et de Christiane Taubira, alors députée française. La forêt sacrée de Ouidah attire aujourd’hui des visiteurs et des touristes des quatre coins du monde.