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La "remigration" au menu d'une réunion secrète, l'extrême-droite choque en Allemagne / Le pourboire, une tradition coûteuse au Canada

19 janvier 2024

Une réunion secrète, un plan de "remigration" pour expulser des millions d'étrangers et immigrés "non intégrés"... Les révélations du collectif de recherche Correctiv la semaine dernière ont déclenché une nouvelle vague d'indignation contre l'extrême droite en Allemagne. // Au Canada, le pourboire est une obligation pour les clients de restaurants et bars.

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Des dizaines de milliers de personnes dans les rues de grandes et petites villes allemandes... Les rassemblements ne faiblissent pas depuis les révélations du collectif d'investigation Correctiv au sujet d'une réunion secrète de l'extrême-droite, en novembre à Potsdam. 

Remigration à la sauce identitaire

Manifestation du 14 janvier à Potsdam, en présence d'Olaf Scholz et Annalena Baerbock
Environ 10.000 personnes se sont rassemblées à Potsdam le 14 janvier, parmi eux le chancelier Olaf Scholz (milieu) et la cheffe de la diplomatie Annalena Baerbock (à la gauche du chancelier)Image : Sebastian Gollnow/dpa/picture alliance

Une réunion qui s'est tenue en petit comité dans un hôtel pour discuter d'un plan d'expulsion de millions de personnes étrangères ou d'origine immigrée. Parmi les participants : des personnalités de haut rang du parti d'extrême-droite AfD, des néonazis confirmés ou encore des entrepreneurs aux moyens financiers importants... Et un thème dominant dans les discussions : la "remigration".

A l'origine, un terme utilisé dans le milieu universitaire pour définir le phénomène par lequel des personnes retournent dans leur pays d'origine après une période de vie à l'étranger. La remigration peut être volontaire, en cas par exemple de changement de régime politique, mais elle peut être aussi forcée, si la personne est expulsée voire déportée.

Le mouvement identitaire, qui prend de l'ampleur en Europe ces dernières décennies, s'est approprié le concept pour le transformer en programme politique. 

Expulsions massives, une idée déjà imaginée par les nazis

L'hôtel de Potsdam dans lequel s'est tenue la réunion secrète en novembre
Les participants de la réunion secrète ont discuté d'un plan pour expulser des millions de personnes d'AllemagneImage : Jens Kalaene/dpa/picture alliance

A Potsdam, les participants de la réunion ont discuté ni plus, ni moins, d'expulser des millions de personnes de gré ou de force, avec les moyens mis à disposition par l'Etat : expulser des demandeurs d'asile, des étrangers, mais aussi des citoyens naturalisés qui ne seraient pas correctement "assimilés".

Le plan évoque même, sans le nommer, un "pays modèle" en Afrique du Nord où pourraient être renvoyés jusqu'à deux millions de personnes, y compris "ceux qui aident les réfugiés"...

Une idée qui en rappelle une autre, développée par les nazis en 1940, souligne Correctiv dans son enquête : à l'époque, le régime d'Adolf Hitler envisageait d'envoyer quatre millions de juifs sur l'île de Madagascar. Avant d'opter pour l'extermination de masse, lors de la conférence de Wannsee en 1942... Wannsee qui se trouve d'ailleurs à un jet de pierre, 8 km seulement, de l'endroit choisi pour la réunion secrète de novembre. Un hasard ? Pas si sûr, avance prudemment Correctiv.

Les parallèles historiques ne s'arrêtent pas là : la réunion de Potsdam, à laquelle participaient aussi des représentants fortunés de l'économie allemande, rappelle aussi la rencontre entre Hitler et les industriels en février 1933 à Berlin, juste avant le basculement du pays dans le totalitarisme. Les historiens s'accordent à dire que leur soutien a largement contribué à l'ascension des nazis.

Débat sur l'interdiction de l'AfD

Un manifestant brandit une pancarte sur laquelle on peut lire "Interdiction de l'AfD maintenant"
Interdire l'AfD maintenant, c'est ce que réclament de nombreux manifestantsImage : Christian Ditsch/epd

Depuis les révélations de Correctiv, les appels se multiplient pour faire interdire le parti AfD. Ce dernier ne cesse de grimper dans les sondages en pleine année électorale dans plusieurs Bundesländer, malgré sa classification comme "formation d'extrême-droite confirmée" et sa mise sous surveillance renforcée dans plusieurs régions - on en avait parlé dans Vu d'Allemagne en décembre ! 

Au parti social-démocrate du chancelier Olaf Scholz, on s'interroge quant à la possibilité d'engager une procédure d'interdiction. Rolf Mützenich, chef du groupe parlementaire SPD au Bundestag :

"Chez nous aussi il y a des membres du groupe parlementaire qui s'informent actuellement des conditions préalables à une interdiction."

Les conditions posées par l'article 21 de la Loi fondamentale allemande sont très strictes : pour être déclaré anticonstitutionnel, il faut en effet qu'un parti rejette "les principes élémentaires de la constitution" en l'exprimant "par une attitude agressive" et mette "en danger l'existence de la République fédérale". 

Les constitutionnalistes sont divisés sur les chances de voir aboutir une procédure d'interdiction. Et certaines personnalités, comme le président fédéral Frank-Walter Steinmeier, appellent les partis démocratiques à affronter l'AfD plutôt sur le terrain politique pour regagner le cœur de leurs électeurs. Un point de vue que défend également le patron de la CDU conservatrice, Friedrich Merz :

"Je n'approuve pas les interdictions de partis. Je pense que nous devons combattre les partis politiquement. Cela reste toujours une solution de dernier recours, il ne faut jamais l'exclure. Mais à l'heure actuelle, renforcer encore l'AfD dans son mythe de victime et dans son rôle de martyr, en entamant contre elle une procédure d'interdiction qui durera des années et fera l'objet d'un débat politique durable, je ne crois pas que ce soit une bonne chose."

L'AfD profite du bruit

Alice Weidel, présidente du groupe parlementaire AfD
Alice Weidel s'est séparée de son bras droit qui avait assisté à la réunion secrèteImage : Kay Nietfeld/dpa/picture alliance

Suite aux révélations de Correctiv, la co-présidente de l'AfD, Alice Weidel, s'est séparée de son représentant personnel Roland Hartwig qui avait participé à la rencontre de Potsdam. Mais le député Gerrit Huy et le président du groupe parlementaire régional de l'AfD de Saxe-Anhalt, Ulrich Siegmund, également présents à la réunion secrète, assument ouvertement leur position. 

Sur la plateforme X, le parti surfe désormais sur la vague de la "remigration". L'AfD qui se félicite aussi dans un post du score "sensationnel" d'un de ses candidats à une élection locale en Thuringe : 45,7%, malgré, je cite, "la campagne de dénigrement des médias".

L'ascension du parti, dans les urnes et les enquêtes d'opinion, se poursuit, aussi bien au niveau régional que national. Selon un sondage de l'institut Insa effectué le 16 janvier pour le quotidien populaire BILD, l'AfD obtiendrait 23% des voix si les élections législatives avaient lieu ce dimanche, contre 31% pour la CDU, mais aussi tous les partis de la coalition gouvernementale - SPD, Verts et libéraux - réunis !

Pétition contre Höcke

Manifestation contre l'AfD à Magdebourg, en Saxe-Anhalt
Björn Höcker est un nazi, dit la pancarte de ce manifestant à MagdebourgImage : Carsten Koall/dpa/picture alliance

Dans les Länder de l'est de l'Allemagne, l'AfD est même la première force politique avec plus de 30% selon les sondages... Ces derniers jours, les regards sont braqués sur la Thuringe, qui réélit son parlement régional en septembre prochain. Les craintes sont grandes de voir Björn Höcke, tête de liste de l'AfD dans cette région, accéder à la présidence. Une pétition en ligne pour réclamer la suppression de ses droits fondamentaux a réuni plus d'un million de signatures en quelques jours ! 

L'appel intitulé "Stoppez le fasciste Björn Höcke" souligne que le responsable de l'AfD est un "ennemi dangereux de la démocratie" et appelle le gouvernement à déposer une demande de déchéance des droits fondamentaux, conformément à l'article 18 de la Constitution.

Le nombre de signatures va obliger la commission des pétitions du Bundestag à se pencher sur la requête et en auditionner ses auteurs. L'objectif est de rendre Björn Höcke inéligible et incapable d'exercer des fonctions publiques pour la durée de la déchéance... Affaire à suivre !

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Pourboire obligatoire : les Canadiens se rebiffent

Une serveuse dans un café de Montréal
Les serveurs et personnels de bars et restaurant touchent un salaire inférieur à celui de la moyenneImage : Alexis Gacon/DW

Vu d'Allemagne, deuxième partie ! Comme promis on part maintenant pour le Canada. Il y a une chose qui surprend quand on se rend pour la première fois dans ce pays ou aux Etats-Unis : le pourboire, ou le "tip" comme on l'appelle là-bas, n'est pas inclus dans l'addition comme c'est le cas dans la plupart des pays. Il faut ajouter au moins 15% à la note !

Ce qui fait qu'entre le prix que vous voyez affiché et ce que vous payez, la différence peut atteindre un tiers... Tout cela fait débat en ce moment, alors que l'inflation fait rage depuis deux ans et freine les envies de restaurant des consommateurs.

Mais le pourboire, là-bas, c'est très important pour les serveurs parce que leur salaire de base est en-dessous du salaire minimum. Au Québec, par exemple, le salaire minimum des métiers à pourboire est de 12,20 dollars par heure contre 15,25 dollars pour le salaire minimum des autres métiers. C'est-à dire que l'État considère que les serveurs reçoivent un pourboire suffisant pour compenser.

En plus de devoir nous faire sortir la calculette, de plus en plus, le pourboire divise au Canada... Un reportage en immersion d'Alexis Gacon...

 

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Politique, économie, histoire... Vu d'Allemagne est un podcast hebdomadaire sur l'Allemagne, avec un grand reportage international en seconde partie d'émission.